Publicité

Réforme de l'ENA : le gouvernement prudent après le rapport Thiriez

L'ex-président de la Ligue de football professionnel a remis ce mardi les résultats de sa mission sur la réforme de l'ENA et de la haute fonction publique. Frédéric Thiriez propose notamment de supprimer l'institution au profit d'une Ecole d'administration publique. Matignon a promis de refonder l'ENA d'ici à 2022, mais certaines des pistes proposées (discrimination positive, fin du classement de sortie) ne sont pas évoquées.

L'Ecole nationale de l'administration (ENA) devrait être remplacée par une Ecole d'administration publique (EAP).
L'Ecole nationale de l'administration (ENA) devrait être remplacée par une Ecole d'administration publique (EAP). (Nicolas TAVERNIER/REA)

Par Tifenn Clinkemaillié

Publié le 18 févr. 2020 à 13:43Mis à jour le 19 févr. 2020 à 09:41

Révolution ou simple toilettage ? Après des mois d'attente et de reports , Frédéric Thiriez a finalement rendu mardi, à Edouard Philippe, son très attendu rapport sur la réforme de l'ENA et de la haute fonction publique, promise par Emmanuel Macron au printemps dernier en réponse à la crise des « gilets jaunes ». L'ancien président de la Ligue de football professionnel, lui-même énarque, brasse large, préconisant 42 mesures pour que les hauts fonctionnaires soient plus représentatifs de la société.

Pas sûr pour autant que cela débouche sur un vaste chambardement. Sitôt le rapport remis, Matignon a dégainé un communiqué qui semble couper court à plusieurs des pistes les plus symboliques. « Les choix faits dans ce communiqué sont plutôt minimalistes », reconnaît un bon connaisseur du dossier. Edouard Philippe promet le remplacement de l'ENA par une « école de management public » à l'horizon 2022 avec, d'ici là, « cinq axes de travail » pour mettre en musique la réforme. « Le rapport Thiriez a le mérite d'embrasser largement les problèmes. Mais il ne faudrait pas passer à la trappe les dossiers importants à traiter que sont les moyens nécessaires pour renforcer la démocratisation de l'école, et surtout la transformation de la gestion des ressources humaines au sein de l'appareil d'Etat », prévient Daniel Keller, président de l'association des anciens élèves de l'ENA.

Tour d'horizon des principales mesures de ce rapport, et du sort qu'elles pourraient subir :

Publicité

· L'ENA est morte, vive l'EAP

Le constat est dressé : la formation actuelle des hauts fonctionnaires souffre « d'une diversité très insuffisante avec une surreprésentation des classes supérieures, une répartition des sexes profondément déséquilibrée et un quasi-monopole parisien pour la préparation aux différents concours ».

Aux grands maux, les grands remèdes. Le rapport de Frédéric Thiriez préconise de faire disparaître l'Ecole nationale de l'administration, fondée en 1945. A la place, une Ecole d'administration publique (EAP) qui accueillerait les ex-énarques mais aussi les ingénieurs des grands corps techniques, actuellement recrutés principalement par Polytechnique ou les Ecoles normales supérieures.

Ce sigle EAP ne survivra peut-être pas au rapport, puisqu'Edouard Philippe, dans son communiqué, parle, lui, d'une « école de management public » pour remplacer l'ENA.

· Socle commun

Dédiée à la formation de l'ensemble des hauts fonctionnaires, la formation des élèves se baserait sur un socle commun de six mois géré par sept écoles (administrateurs civils, magistrats, commissaires, pénitentiaire, santé publique…). Ce principe semble acter, puisque le Premier ministre a fait du « décloisonnement des formations des hauts fonctionnaires, quelle que soit leur filière de spécialisation » le deuxième axe de travail pour le gouvernement. Il n'est en revanche pas question de fusionner certaines grandes écoles de formation des fonctionnaires (santé, magistrature) et d'ingénieurs (X, Mines, Ponts) comme cela avait été évoqué un temps.

Pour le rapport de Frédéric Thiriez, une large part de ce cursus commun aura lieu sur le terrain, avec même une préparation militaire de trois semaines et un encadrement des jeunes du service national universel pendant trois semaines. Le gouvernement ne rentre pas pour le moment dans ce degré de détails mais évoque « un stage long en territoire et un engagement citoyen obligatoires, ou une préparation militaire ».

· Suppression du classement de sortie

C'est sans doute l'une des mesures les plus sensibles. Maintes fois évoquée depuis plusieurs décennies, l'idée de la suppression du classement de sortie - qui permettait notamment de constituer « la botte » de la quinzaine des meilleurs élèves intégrant directement les grands corps du Conseil d'Etat, de la Cour des comptes et de l'Inspection générale des finances - est reprise dans le rapport. Un coup pour rien ? La mesure n'est en tout cas pas évoquée dans le communiqué de Matignon, pas plus que l'idée de supprimer ces grands corps qui avaient été un temps évoqués l'année dernière. En revanche, il reprend l'idée du rapport de conditionner l'entrée dans un grand corps au passage préalable par une administration de terrain pendant quelque temps.

· Un concours remanié

Publicité

Autre point de crispation : la mixité sociale. Pour lui assurer une plus grande place, le rapport Thiriez préconise de remanier le concours d'entrée de la remplaçante de l'ENA, notamment en supprimant les épreuves de culture générale mais aussi en prévoyant un « concours spécial Egalité des chances » qui réserverait 10 % à 15 % des places à des élèves de milieu modeste. Aucune de ces pistes n'est mentionnée dans le communiqué de Matignon qui évoque seulement une « refonte totale du contenu des concours dans un sens moins académique ». En revanche, l'exécutif reprend à son compte la proposition de créer des classes préparatoires « égalité des chances », et promet « l'intégration systématique d'un quota de boursiers dans l'ensemble des masters et classes préparatoires aux grandes écoles de la fonction publique ».

Tifenn Clinkemaillie

MicrosoftTeams-image.png

Nouveau : découvrez nos offres Premium !

Vos responsabilités exigent une attention fine aux événements et rapports de force qui régissent notre monde. Vous avez besoin d’anticiper les grandes tendances pour reconnaitre, au bon moment, les opportunités à saisir et les risques à prévenir.C’est précisément la promesse de nos offres PREMIUM : vous fournir des analyses exclusives et des outils de veille sectorielle pour prendre des décisions éclairées, identifier les signaux faibles et appuyer vos partis pris. N'attendez plus, les décisions les plus déterminantes pour vos succès 2024 se prennent maintenant !
Je découvre les offres

Nos Vidéos

xx0urmq-O.jpg

SNCF : la concurrence peut-elle faire baisser les prix des billets de train ?

xqk50pr-O.jpg

Crise de l’immobilier, climat : la maison individuelle a-t-elle encore un avenir ?

x0xfrvz-O.jpg

Autoroutes : pourquoi le prix des péages augmente ? (et ce n’est pas près de s’arrêter)

Publicité