A chaque rapport de la Cour des comptes son lot de charges, parfois violentes. Dans son rapport annuel rendu public mardi 25 février, l’institution épingle largement l’Ecole polytechnique. Dans un chapitre intitulé « Une stratégie incertaine, une gestion à redresser », elle pointe les manquements de la prestigieuse école d’ingénieurs sous statut militaire, dont sont issus de hauts cadres de l’Etat comme nombre de patrons de grands groupes.
Au premier rang des mauvais points décernés par la Cour : la gestion de l’établissement, « pas à la hauteur de sa réputation ». Les magistrats voient rouge : cinq exercices déficitaires consécutifs se sont accumulés, de 2014 à 2018, se traduisant par une perte cumulée de près de 20 millions d’euros ; et ce, malgré un soutien financier accru de l’Etat à partir de 2016. Une situation financière « préoccupante », juge la Cour.
« Résultats gonflés artificiellement »
Ce trou, apparu en 2014, s’expliquerait notamment par « des pratiques comptables inadaptées ayant conduit à gonfler artificiellement les résultats de l’école en 2012 et 2013 ». Le déploiement d’une « offre de formation foisonnante et coûteuse » est également souligné, telle la création récente d’un « bachelor » international qui, malgré des frais d’inscription élevés (15 000 euros), n’atteint pas encore l’équilibre, faute d’un nombre de candidats suffisant.
La tutelle de l’école, le ministère des armées, « n’a à aucun moment envisagé la mise en place d’un plan de retour à l’équilibre, alors que cela lui était, à tout le moins, imposé par le code de l’éducation » à compter de 2015, s’étonnent les auteurs du rapport, qui appellent à redresser la barre. En 2018 encore, les comptes prévisionnels ont été présentés à l’équilibre (+ 0,5 million), alors que l’exercice s’est soldé par un déficit de 7,7 millions d’euros.
Au-delà des questions budgétaires, la stratégie de regroupement de l’Ecole polytechnique pose également problème aux magistrats. Etait-il pertinent de fissurer l’université Paris-Saclay en deux, avec, d’un côté, l’université Paris-Sud, Centrale Supélec, AgroParisTech… de l’autre, Polytechnique et ses consœurs, l’Ensta Paris Tech, l’Ensae, les Télécom… parties sous la bannière de l’Institut polytechnique de Paris ? La décision de séparation en deux pôles a été annoncée par le président de la République Emmanuel Macron lors d’un déplacement sur le plateau francilien, en octobre 2017.
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