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Comment l'Education nationale a perdu 400 millions d'euros avec son logiciel de paie

Le programme SIRHEN qui devait gérer la paie des agents de l'Education nationale et que le gouvernement a stoppé en 2018, aura coûté 400 millions d'euros pour ne concerner que 2 % des personnels du ministère, affirme la Cour des comptes dans son rapport annuel publié mardi.

La « dérive continue des coûts et des délais » va se poursuivre au fil des années, « malgré la multiplication des audits », pointe la Cour des comptes à propos du programme ressources humaines de l'Education nationale, SIRHEN.
La « dérive continue des coûts et des délais » va se poursuivre au fil des années, « malgré la multiplication des audits », pointe la Cour des comptes à propos du programme ressources humaines de l'Education nationale, SIRHEN. (Nicolas TAVERNIER/REA)

Par Marie-Christine Corbier

Publié le 25 févr. 2020 à 15:53Mis à jour le 26 févr. 2020 à 12:36

Treize ans de « dérives nombreuses » et « un investissement de 400 millions d'euros qui n'aura servi à rien » : la Cour des comptes revient, dans son rapport annuel publié ce mardi , sur les raisons de l'échec du programme SIRHEN, le système d'information et de gestion des ressources humaines de l'Education nationale, stoppé par le gouvernement à l'été 2018 .

Lancé fin 2006, il devait remplacer tous les systèmes d'information gérant les 1,1 million d'agents du ministère et permettre de gérer leur paie, leur avancement, leur affectation, leur formation et leur évaluation. Il a viré au cauchemar.

« Perte de contrôle »

Il devait au départ être développé en cinq ans, pour un coût de 60 millions d'euros. Pour ce programme « ambitieux », le ministère de l'Education avait, contrairement à ses habitudes, choisi d'externaliser la conception et la réalisation de la totalité du projet. Or, selon la Cour, « l'ampleur des prestations externalisées a privé le ministère d'une maîtrise suffisante de l'outil qu'il construisait », engendrant « une perte de contrôle », y compris pour les missions de maîtrise d'ouvrage les plus classiques.

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La « dérive continue des coûts et des délais » va ainsi se poursuivre au fil des années, « malgré la multiplication des audits », raconte la Cour. En 2012, la gouvernance est revue, mais la confiance dans le projet « s'affaiblit », alors que le fameux programme Louvois pour la solde des militaires est abandonné en 2013. « Le choix d'un recours large à des prestataires extérieurs pouvait se concevoir à la condition expresse que le ministère se dote des moyens internes de suivi, soulignent les magistrats. Or, le ministère n'a jamais su constituer une direction de programme pourvue des compétences indispensables. »

Un risque « d'accident de production » sur la paie des agents

A l'été 2018, lors de l'annonce de l'arrêt de SIRHEN, le ministre de l'Education, Jean-Michel Blanquer, avait annoncé une réflexion pour définir un programme de substitution, avec l'appui d'un consortium de consultants pour sécuriser les systèmes d'information historiques et envisager leur modernisation. « En septembre 2019, plus d'un an après l'arrêt du programme SIRHEN, le ministère n'avait cependant toujours pas arrêté de nouvelle trajectoire pour moderniser ses systèmes d'information et de gestion RH », regrette la Cour. Or, depuis l'arrêt du programme SIRHEN, le fonctionnement des systèmes d'information historiques « constitue le risque le plus critique pour le ministère ». Un risque « d'accident de production » pourrait « altérer la réalisation des actes de gestion les plus sensibles, y compris la paie des agents », car les applications actuellement utilisées sont vétustes.

En 2019, le ministère a « enfin » engagé la sécurisation de ces systèmes d'information historiques, ce qui devrait prendre deux ans, pour une dépense de 8 millions d'euros. « Ces travaux doivent assurer leur pérennité pour au moins dix ans et ainsi prémunir le ministère d'un incident majeur », écrit la Cour qui juge « peu compréhensible » qu'ils n'aient « pas été engagés plus tôt ».

Dans sa réponse écrite à la Cour, Matignon évoque toutefois une nouvelle trajectoire, validée en octobre 2019 et un « outillage » mis en place « pour assurer un suivi pragmatique, opérationnel et aisément compréhensible des différents chantiers mis en oeuvre, tant du point de vue de leur coût que de leur avancement ».

Quant au programme SIRHEN, qui ne gère que 2 % des personnels de l'Education nationale, il est, selon la Cour, « voué à disparaître », vu sa complexité et sa propre obsolescence.

Marie-Christine Corbier

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