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Inquiets pour leur avenir, les experts-comptables se projettent en consultants

Réduction des mandats avec le relèvement des seuils instauré par la loi Pacte, automatisation des procédés, les experts-comptables voient disparaître une partie de leur activité traditionnelle. Secoués comme jamais, ils doivent prendre le virage du conseil, quitte à marcher sur les plates-bandes des consultants. Mais les petits cabinets pourraient ne pas y survivre.

A l'instar d'autres secteurs, les professionnels du chiffre sont percutés de plein fouet par la numérisation des procédés.
A l'instar d'autres secteurs, les professionnels du chiffre sont percutés de plein fouet par la numérisation des procédés. (Getty Images/EyeEm)

Par Marion Kindermans

Publié le 28 févr. 2020 à 07:29

Le conseil, nouvel eldorado des experts-comptables ? Face à la fin annoncée de ses activités traditionnelles, la profession cogite sur d'autres sources de profit. Et lorgne sur le conseil aux entreprises, quitte à marcher sur les plates-bandes des consultants, pas vraiment prêts à lâcher du terrain sur ce marché fructueux.

Car les experts-comptables, contraints et forcés, doivent se réinventer. Le secteur, composé de 21.000 experts-comptables et de 130.000 collaborateurs répartis dans 10.000 cabinets, accompagne 2,5 millions d'entreprises. Mais tout cela pourrait bien fondre comme neige au soleil.

Car c'en est fini de la compta « à la papa ». A l'instar d'autres secteurs, les professionnels du chiffre sont percutés de plein fouet par la numérisation de leur métier. Prélèvement à la source, généralisation de la facture électronique, déclaration fiscale préremplie pour la TVA… l'élaboration comptable faite auparavant par l'expert-comptable pour aider le patron de TPE ou PME dans les méandres administratifs est finie.

Séisme dans les seuils

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Autre paramètre qui secoue la profession : la loi Pacte qui, à travers plusieurs articles, pousse à un changement en profondeur du métier. Le relèvement des seuils obligeant les entreprises à faire certifier leurs comptes par un commissaire aux comptes fait craindre un séisme. Pour s'aligner sur la norme européenne et ôter ce coût pour les petites entreprises, il passe de 3,1 à 8 millions d'euros de chiffre d'affaires.

Or, la grande majorité des cabinets d'experts-comptables, qui sont de petites structures, exercent aussi le métier de commissariat aux comptes. La profession craint la perte de 150.000 mandats (sur 220.000 au total) avec cette mesure. « L'impact sera réellement connu dans six ans, lorsque tous les mandats arriveront à leur fin et que l'on verra si les petites entreprises renouvellent leur mandat ou non », tempère Charles-René Tandé, président du Conseil supérieur de l'Ordre des experts-comptables. Mais l'inquiétude est bien là.

Attractivité du métier

Pour les rassurer, le législateur leur offre la possibilité de s'orienter vers d'autres missions d'accompagnement, en encadrant les spécialisations choisies (il faut certifier d'un certain nombre d'heures), qu'ils pourront afficher sur leur carte de visite, leur site Internet. Transmission, gestion de patrimoine, financement… le champ des besoins des dirigeants d'entreprise est large. « Cela permettra aussi de rendre ce métier plus attractif auprès des jeunes », revendique Charles-René Tandé.

Les gros fourbissent leurs armes, à l'instar du lyonnais In Extenso , qui a pris son indépendance par rapport à Deloitte il y a un an pour mieux se recentrer sur sa clientèle TPE et PME. « Notre rôle va clairement évoluer vers des tâches de contrôle et de conseil », confirme Antoine De Riedmatten, son président. Ce poids lourd (425 millions d'euros de chiffre d'affaires, 5.000 personnes), déjà présent dans la fusion-acquisition, l'innovation, rachètera au printemps une société de gestion de patrimoine, et pense déjà au conseil en financement, pour aller vers une offre « full services ». Un pas vers le monde des consultants ? « Les consultants sont dans leurs tours à la Défense et vont voir leurs clients une ou deux fois. Nous, nous les accompagnons en étant proches, nos clients sont situés à moins de 30 kilomètres de nos agences », argue-t-il.

Concentration

Mais ce virage à 180° ne se prendra pas si facilement. « Cela demande un effort d'adaptation, de formation, il faudra diversifier les recrutements, tous les cabinets ne pourront pas faire cela, il y aura forcément de la casse », clame Laurent Benoudiz, président de l'Ordre des experts-comptables de Paris Ile-de-France. Pour Philippe Barré, expert-comptable et associé chez B-ready, le risque est de vendre du rêve car « le conseil ne représente que 7 % de l'activité des cabinets de moins de 50 salariés sans que cela évolue depuis vingt ans ».

La concentration du marché, déjà engagée, devrait s'accélérer. Derrière les Big Four» et quelques gros régionaux, une myriade de petits cabinets vont ou disparaître ou se regrouper. « Ceux qui vont le plus souffrir seront les petits généralistes », reconnaît Charles-René Tandé.

Marion Kindermans

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