« On est gâtés, cette année ! » Laura (le prénom a été modifié) en rigolerait presque au bout du fil. Cette élève de 1re au lycée Théophile-Gautier de Tarbes est confinée, comme 12,7 millions d’élèves français, depuis le 13 mars et jusqu’à une date encore inconnue – au moins jusqu’au 4 mai, a prévenu le ministre de l’éducation nationale, Jean-Michel Blanquer. Pour Laura, le confinement n’est que le dernier rebondissement d’une année déjà riche en difficultés.
En septembre 2019, les élèves de 1re et leurs professeurs ont en effet expérimenté le nouveau lycée, où des matières « de spécialité » remplacent les séries S, ES et L de la voie générale. Au programme, « groupe classe » éclaté, nouveaux programmes, nouvelles épreuves… : « On a commencé l’année de 1re en ayant l’impression d’arriver à la fac », dit Laura.
Et alors que les lycéens commençaient à trouver leurs marques, le mouvement de grève contre la réforme des retraites, à partir du 5 décembre, a fait « sauter les cours ». Et encore, Laura se dit chanceuse : les nouvelles épreuves communes de contrôle continu (E3C) du bac, perturbées dans de nombreux établissements entre janvier et mars, se sont déroulées sans encombre dans son lycée. Isabelle, la mère d’une élève de 1re scolarisée à Sète (Hérault), qui a souhaité garder l’anonymat, est moins nuancée. « Entre le 5 décembre et la fin janvier, le professeur de SVT n’a pas fait cours, explique-t-elle. Au retour des vacances de février, ça a commencé à aller mieux… Et maintenant, le coronavirus. L’année est pliée. »
Ne pas « creuser les écarts »
Entre les grèves et la perturbation des E3C, beaucoup d’enseignants se disaient déjà en retard sur le programme – en particulier pour les 1re : « Jusqu’au confinement, les terminales ont eu une année normale », souligne Philippe Vincent, du SNPDEN. Un enseignant d’histoire du lycée Jean-Jacques-Rousseau, à Sarcelles (Val-d’Oise), dit ainsi avoir fait « trois thèmes sur cinq » avec ses élèves de spécialité histoire. Les « multiples perturbations » sont venues, selon lui, s’ajouter à « la difficulté normale » de s’emparer d’un nouveau programme.
Avec l’enseignement à distance, « avancer devient encore plus délicat, car nous n’avons aucun moyen de vérifier que les élèves nous suivent », ajoute-t-il inquiet. De plus, tous n’appliquent pas la même doctrine face au confinement : certains enseignants souhaitent finir le programme, d’autres, soucieux de ne pas « creuser les écarts », misent sur les révisions et la méthodologie.
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