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Coronavirus : l'école à la maison, baptême du feu des entreprises de la EdTech

Hissées au premier rang par la fermeture des écoles, les jeunes pousses de l'éducation numérique tentent de gagner en notoriété et faire leurs preuves en multipliant les offres. Alors que l'Education nationale reste frileuse vis-à-vis à ce marché émergent et fragile en France, certains veulent croire que cette période « d'école à la maison » annonce un tournant.

Classes virtuelles, carnets de liaison en ligne, ressources pédagogiques, webinars, jeux éducatifs, l'offre d'éducation en ligne est multiple.
Classes virtuelles, carnets de liaison en ligne, ressources pédagogiques, webinars, jeux éducatifs, l'offre d'éducation en ligne est multiple. (Le Livre Scolaire.fr)

Par Laurence Albert, Léa Delpont

Publié le 30 mars 2020 à 15:22Mis à jour le 31 mars 2020 à 09:42

La fermeture brutale des écoles et universités le 16 mars a mis sous les feux des projecteurs les jeunes pousses de la EdTech (numérique éducatif).

Ces nouveaux acteurs de l'enseignement à distance suscitent depuis quelques jours de fortes attentes - et quelques déconvenues - chez 2 millions d'enseignants, 12 millions d'élèves et 20 millions de parents désemparés. Classes virtuelles, carnets de liaison en ligne, ressources pédagogiques, webinars, jeux éducatifs… l'offre, pléthorique, a de quoi donner le tournis aux plus aguerris.

D'ores et déjà, les ténors des EdTech ont enregistré un pic d'activité. OpenClassRooms note qu'après une semaine, 500 établissements et 70.000 étudiants ont réclamé une licence de sa solution Spark, qui assure une continuité pédagogique. Chez DigiSchool , premier acteur national du marché de la révision scolaire avec des cours et des exercices en autocorrections, le trafic a bondi de 90 % sur les sites dédiés aux niveaux brevet et bac, « générateurs d'angoisse ». LeLivrescolaire.fr, qui conçoit des manuels collaboratifs de la 6e à la Terminale, construits par une communauté de 2.000 contributeurs a vu son audience tripler depuis l'annonce de la fermeture, avec des pics de connexions simultanées à 2.600 personnes. Un sursaut d'activité globalement positif, même si certaines jeunes pousses comme Klassroom (application de mise en relation entre parents et enseignants) ont été techniquement débordées par leur succès. Au point de devenir, comme le Cned, et certains ENT, difficilement accessibles les premiers jours.

Transformer l'essai

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« Les entreprises du secteur espèrent pouvoir prouver leur utilité alors que leur utilisation est contrastée en temps normal dans le milieu scolaire », estime Aurite Kouts, ​responsable de la communauté EdTech au sein du pôle de compétitivité francilien Cap Digital (80 entreprises). Une opération de communication rondement menée a donc conduit 200 d'entre elles à proposer des abonnements gratuits le temps du confinement via la plateforme solidarite.edtechfrance.fr. L'objectif étant de transformer l'essai auprès des utilisateurs. Membre de Cap Digital, Ecole O'clock, école de développeurs, propose ainsi la gratuité de son outil de classe virtuelle.

Même chose à Lyon, fief de la EdTech (33 entreprises), où Woonoz a annoncé ouvrir à tous les établissements, sans frais, son programme de remise à niveau orthographique Projet Voltaire. Avec 5 millions d'utilisateurs du primaire à Bac +5, il a fait sa notoriété depuis 2010. Et la démonstration de la méthode « d'ancrage mémoriel » de Woonoz, basée sur l'intelligence artificielle appliquée aux mécanismes de la mémoire. Passé sous le contrôle d'Hachette en janvier, Lelivrescolaire.fr a lui aussi décidé d'ouvrir gratuitement à tous les collèges et lycées son mode premium payant, qui permet de gérer les devoirs à la maison.

Chez Digischool, le président, Anthony Kuntz va anticiper le lancement de l'offre premium prévue en septembre, à 9,99 euros par mois, et fixer l'abonnement à 1 euro le temps de la crise. « On attend un peu avant de faire des annonces, tempère-t-il. On veut laisser le temps à l'Education nationale de s'organiser avec le CNED et se positionner avec des solutions complémentaires. » Par exemple, des tutoriels à l'adresse des parents, pour gérer l'emploi du temps scolaire des enfants à la maison, ou les garder motivés.

Marché qui peine à décoller

Si les entreprises de la EdTech se montrent aussi précautionneuses avec l'Education nationale, c'est qu'elles savent qu'une partie délicate se joue en ce moment. Malgré la présence de deux fonds d'investissement, d'une association EdTechFrance, et de quelques pépites, le marché français du secteur scolaire peine à décoller : il ne pesait que 89 millions d'euros en 2017 selon la Caisse des Dépôts. L'écosytème a grandi dans l'ombre d'un « Mammouth », qui ne dit mot, ne labellise rien, et ne jure que par son propre outil, le Cned, sachant pertinemment qu'une partie de ses enseignants « bricole » déjà avec ces nouveaux outils. Lundi 23 mars, le ministre de l'Education nationale Jean-Michel Blanquer, a une nouvelle fois tenu le secteur privé à distance dans une interview au « Parisien » .

« On ne va pas remplacer les professeurs ni le CNED mais nos ressources pédagogiques différentes, à base de quiz, de vidéos, apportent une autre vision qui peut aider parfois les élèves », cherche à rassurer Anthony Kuntz. Chez Lelivrescolaire.fr, Raphaël Taïeb abonde dans le même sens, estimant que cet épisode permettra de « rendre ses galons à une profession stigmatisée ». « On va mesurer combien l'éducation, c'est compliqué sans les professeurs. Tous les sites du monde ne pourront pas les remplacer. »

Beaucoup estiment cependant qu'un tournant pourrait être pris. « La crise actuelle est un point charnière non pas pour le numérique éducatif, mais pour le système éducatif tout entier. Il ne s'agit pas de dire que tout va basculer en ligne du jour au lendemain, c'est faux et pas forcément souhaitable. En revanche, l'épisode actuel va hâter l'adoption de modalités éducatives en ligne existantes mais encore peu ou mal utilisées » assure Pierre Dubuc, le cofondateur d'OpenClassrooms.

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Laurence Albert et Léa Delpont

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