Les auxiliaires de vie, parents pauvres de la lutte contre le coronavirus
L'ex-député PS Jérôme Guedj vient de remettre au gouvernement un rapport pour « lutter contre l'isolement des personnes âgées ». L'accès aux équipements de protection reste difficile pour les soignants à domicile. Ils espèrent être prioritaires dans la politique de dépistage du coronavirus.
Par Nathalie Silbert
En France, elles sont des centaines de milliers d'aides à domicile et auxiliaires de vie à intervenir quotidiennement chez des personnes âgées ou handicapées. Aide au lever, à la toilette, au repas, au coucher : autant de tâches indispensables pour permettre à toutes ces personnes fragiles de rester chez elles. « Il y a 1,5 million de personnes à domicile en grande fragilité », indique Jérôme Guedj, ex-député PS de l'Essonne, qui vient de remettre au ministre de la Santé, Olivier Véran, son rapport pour « lutter contre l'isolement des personnes âgées et fragiles isolées en période de confinement ».
Dans ce combat, les soignants à domicile ont un rôle crucial. Mais leur accès aux équipements de protection et le soutien matériel qui leur est proposé (garde d'enfants, déplacement…) ne sont pas à la hauteur.
« Il y a un problème culturel de représentation de ces métiers », déplore Guillaume Quercy, le président de l'Union nationale de l'aide, des soins et des services aux domiciles (UNA).
Neuf masques par semaine
Depuis le début de l'épidémie, se protéger a été un vrai casse-tête pour les auxiliaires de vie et les aides à domicile qui côtoient pourtant les personnes vulnérables. Pour les masques, il a d'abord fallu passer par les pharmacies. Mais déjà sollicitées par les infirmières et les médecins, elles n'en avaient pas toujours assez pour elles. Depuis, les Agences régionales de santé ont pris en charge la distribution et la situation s'est améliorée. Les auxiliaires de vie n'ont toutefois droit qu'à neuf masques par semaine. Trop peu au regard de leurs huit à dix patients quotidiens.
Mais à présent, ce sont les surblouses, les charlottes, les gants qui font défaut. Accompagner des malades du Covid-19 à leur sortie de l'hôpital fait partie de leur mission prioritaire.
Un taux d'absence de 40 %
« Avec la crise, les tournées se sont recentrées sur les actes essentiels », souligne Thierry d'Aboville, secrétaire général de l'ADMR, le premier réseau de service à la personne en France. Ce, d'autant que les troupes se sont réduites. Une partie des auxiliaires de vie sont en arrêt maladie ou souhaitent garder leurs enfants. S'ajoute, pour certaines, la crainte d'apporter le virus chez le patient, ou de le contracter et de contaminer sa famille. Ainsi, l'ADMR tourne actuellement avec 60 % de ses 94.000 salariés. « Nos 95.000 bénévoles maintiennent le lien par téléphone », précise Thierry d'Aboville.
Dans son rapport, Jérôme Guedj propose de mobiliser en renfort des ressources nouvelles pour soutenir les plus fragiles, que ce soient les 30.000 jeunes du service civique actuellement sans mission ou les 70.000 gardiens d'immeuble… D'ici à la fin de la semaine, un numéro vert national d'écoute de la Croix-Rouge pour les personnes âgées isolées sera disponible.
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