Coronavirus : en mal de patients, les ambulances se diversifient
La filiale de Keolis lance un nouveau type de véhicule pour aider les médecins à faire des diagnostics à distance. Une initiative sur fond de crise du secteur des ambulances, un métier déjà financièrement fragile avant la crise.
Par Denis Fainsilber
Dans le marché paradoxalement sinistré du transport sanitaire, Keolis Santé innove pour défricher de nouvelles niches de marché. Le numéro un français du transport sanitaire a noué un partenariat avec le département de Vendée pour déployer un nouvel outil de téléconsultation : un véhicule bardé d'équipements pour aider en amont les médecins dans leur diagnostic.
« C'est une ambulance de grand gabarit, dotée d'un infirmier et d'un ambulancier et connectée par satellite, équipée notamment d'électrocardiogramme, d'équipement de biologie pour des prises de sang, de stéthoscopes connectés, d'oxygène, etc. », dévoile Roland de Barbentane, président de la filiale spécialisée de Keolis. Avec une tournée planifiée par le médecin-chef du département, ce véhicule pourra se rendre, par exemple, dans les hameaux ou dans la cour d'un Ehpad , pour faciliter les diagnostics.
Il pourra servir pour le dépistage du Covid-19, mais pas uniquement. « La crise actuelle a révélé les inégalités face aux soins, à la fois sociales et territoriales. Avec cet outil, nous ne sommes en concurrence avec personne », développe le dirigeant. « Cette première nationale s'inscrit pleinement dans les orientations prises par le conseil départemental, notamment de renforcer notre action en faveur du maintien à domicile », ajoute Isabelle Rivière, vice-présidente du département de Vendée. Plusieurs départements et autorités régionales de santé (ARS) ont été contactés, en vue de dupliquer ce système.
Peu de visites programmées
Une initiative lancée alors que la crise sanitaire n'a absolument pas dopé le secteur du transport du même nom. L'activité des ambulanciers français est stabilisée à un niveau extrêmement bas, soit de 25 à 30 % de la normale. Car le gros du métier, les visites programmées, par exemple pour des diabétiques, des séances de kiné ou des patients suivant une chimiothérapie, s'est écroulé avec le confinement.
« En temps normal, nous effectuons 9.000 missions par jour, mais sommes en retrait de 70 % de ça », indique le patron de Keolis Santé qui opère dans toute la France, sauf le nord, sous la marque Jussieu Secours, avec 4.400 employés et 2.200 véhicules, y compris des taxis conventionnés.
Les transports sanitaires liés au Covid-19 ne représentent « que 200 missions par jour, mais nous prennent 80 % de notre énergie, et énormément de temps. Une mission normale prend d'ordinaire environ 40 minutes, mais dans le cas du Covid, c'est plutôt une heure et demie, voire plus », explique-t-il. Car chaque transport donne lieu à une procédure extrêmement codifiée, une tenue complète pour les employés et la désinfection de l'ambulance.
Crise du secteur
Les réunions de crise sont ainsi quasi-quotidiennes pour adapter les protocoles, en fonction du matériel et de la densité de la demande, poursuit-il, en lien avec les pouvoirs publics. « Cette crise aura eu le mérite de créer des lignes courtes entre les protagonistes du secteur. »
Mais elle fait également courir un immense risque sur un métier qui était déjà d'une grande fragilité, avec des marges proches de zéro et beaucoup de petits groupes régionaux. A moins d'un système d'aide à la profession, que tout le monde attend, les défaillances risquent de s'accélérer.
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