Paola Antonelli est la conservatrice du département d’architecture et de design et directrice de la R & D du Museum of Modern Art (MoMA), de New York. Du design réparateur, exposé à la Triennale de Milan, à l’exposition « Material Ecology » en cours virtuellement au musée, elle explique comment la discipline peut être la clé d’un changement d’environnement.
Le MoMA a dû fermer ses portes à la mi-mars du fait de la pandémie causée par le coronavirus. Comment gardez-vous le lien avec votre public ?
Dans chaque département (peinture, sculpture, architecture, design…), nous travaillons étroitement avec nos collègues de l’équipe Creative, Digital Media and Education pour valoriser notre offre numérique. Nous proposons chaque semaine des vues des expositions qui étaient sur les cimaises au moment de la fermeture, des rendez-vous live avec les curateurs et les artistes, et des visites commentées.
Ainsi Neri Oxman, architecte et enseignante au Media Lab du Massachusetts Institute of Technology et son exposition sur le design organique baptisée « Material Ecology » – dont je suis la cocommissaire avec Anna Burckhardt – sera en guest star la semaine du 14 mai, sur Moma.org. En plus de la visite virtuelle de l’exposition, nous avons prévu une présentation introductive et des questions-réponses en live avec cette lauréate, en octobre 2019, du Contemporary Vision Award 2019 du San Francisco Museum of Modern Art.
L’exposition de l’Israélo-Américaine Neri Oxman, qui dit développer des solutions « à des problèmes qui n’existent peut-être pas encore », tombe à pic…
C’est une chance d’avoir profité « en vrai » de cette exposition pendant trois semaines avant la fermeture du musée, car, en effet, le travail de cette chercheuse est avant-gardiste, puisqu’elle a inventé son propre champ d’investigation. Neri Oxman, et son équipe The Mediated Matter Group, présentent sept projets révolutionnaires autour de matériaux qu’ils ont créés, directement inspirés des formes et des capacités physiques du monde vivant.
Plutôt que de construire des objets, ils les font « pousser » en combinant les outils numériques et la biologie, afin qu’ils suivent un cycle de vie plus naturel. Une de nos salles est consacrée à cette architecture à base de mélanine que Neri Oxman a édifiée en Afrique du Sud. De ce pigment universel qui colore notre peau et nos cheveux, mais aussi les ailes des papillons ou les plumes de paon, elle a imaginé de faire un composant intégré aux façades de bâtiments, comme une sorte de peau qui, en fonçant au soleil, se défendrait des UV. Elle protégerait aussi les habitants en absorbant des métaux indésirables pour l’environnement, en produisant de l’énergie ou en abritant les végétaux préférant l’ombre.
Il vous reste 60.16% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.