Vice-présidente en charge de la solidarité à l’université de Lille, qui compte 67 000 étudiants, Emmanuelle Jourdan-Chartier s’inquiète de l’apparition d’une seconde vague d’étudiants en grande difficulté. Elle appelle à des mesures nationales sur les loyers et les bourses.
L’université de Lille déploie des aides sociales et alimentaires pour ses étudiants depuis le début de la crise sanitaire. Où en est-on avec le déconfinement ?
Malheureusement, on voit bien que la situation s’installe. Dans les files d’attente pour venir chercher un colis alimentaire, il y a désormais un public que l’on ne connaissait pas. Depuis plusieurs semaines, on voit une deuxième vague d’étudiants qui n’avaient jamais eu recours à notre accompagnement social jusque-là.
La crise est un miroir grossissant, elle révèle la fragilité du statut étudiant. Beaucoup bricolent pour vivre, entre une bourse, un petit job, un stage… Quand on retire un seul élément de cet équilibre, tout s’écroule.
Dès le confinement, on a bien senti qu’une partie de nos étudiants allait être en grande difficulté. La précarité, on ne l’a pas découverte avec le Covid-19. Nous avons mis en place une aide de 200 euros pour ceux qu’on a pu identifier parce qu’ils bénéficiaient déjà de nos dispositifs sociaux. On s’est vite rendu compte que ça ne suffisait pas. Des cartes cadeaux carrefour ont été distribuées par les Crous et l’université, des sachets repas… Et les premières distributions alimentaires, avec nos partenaires de la Croix-Rouge, du Secours populaire, les épiceries sociales et solidaires, ont commencé le 22 mars, sur le campus scientifique, à Villeneuve-d’Ascq.
Combien d’étudiants font aujourd’hui appel à ces aides ?
Nous accompagnons plus de 2 000 étudiants en résidences Crous, et environ 500 du parc locatif privé qui nous ont contactés au fil de l’eau. Lors de ces distributions de colis, les étudiants arrivent quand même à nous poser des tas de questions d’étudiants, sur leurs partiels. En plus du contexte sanitaire, ils ont une pression matérielle et universitaire, ça commence à faire beaucoup, non ?
Quand on a besoin d’une aide alimentaire d’urgence, on franchit un cap, ce n’est plus de la pauvreté, c’est de la misère. Notre maison des étudiants est devenue un entrepôt avec les produits de la banque alimentaire. Ce sont 300 à 450 colis qui sont distribués chaque semaine avec notre convention avec la Croix-Rouge et le Secours populaire. Il y a un très bel élan de solidarité, aussi chez les personnels qui participent en remplissant des chariots solidaires en grande surface, pour apporter d’autres produits que ceux de première nécessité.
Il vous reste 37.43% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.