Ne leur parlez pas de « rentrée scolaire ». L’expression fait bondir la plupart des parents qui ne trouvent pas de place à l’école. « C’est un ersatz de rentrée, s’énerve Clara, trois enfants (de la maternelle au CM1), et aucun qui ne peut être accueilli dans leur petite école près d’Orléans. Pourquoi ne nous a-t-on pas dit, dès le départ, qu’il faudrait montrer patte blanche pour revenir en classe ? » « Parlons clair : c’est une réouverture au compte-gouttes », témoigne aussi Philippe, papa d’une fillette en CE1 à Paris, qui confie « noyer de messages » sa directrice d’école dans l’espoir d’obtenir une place, « le Graal ».
Avec le changement des règles d’attribution du chômage partiel, début mai, et l’annonce de la deuxième phase du déconfinement, les deux trentenaires, qui ont arrêté de travailler à la mi-mars − quand les écoles ont fermé –, voient s’approcher la « deadline du 1er juin » avec une certaine anxiété. Ils sont loin d’être les seuls.
« La situation des parents risque de devenir explosive en juin », affirme Rodrigo Arenas, coprésident de la FCPE, fédération de parents d’élèves dont toutes les antennes départementales sont en alerte. Clara, avec un emploi dans la vente qui l’attend, envisage de confier la fratrie aux grands-parents : « C’est la première fois qu’ils reverront les enfants. » Philippe, lui, vient d’être rappelé par son école : sa fille devrait y être accueillie lundi. Une « heureuse surprise » pour ce journaliste qui ne s’estimait pourtant pas « prioritaire ».
« Classes charnières »
Qui l’est ? Qui ne l’est pas ? « On s’y perd un peu », souffle-t-on au sein de la communauté éducative. Parce que les 40 000 écoles rouvertes n’ont pas toutes repris en même temps. Parce que certaines ferment d’un jour à l’autre au moindre cas de Covid suspecté (une centaine d’écoles, de source ministérielle), quand d’autres rouvrent. Parce que les élèves y sont convoqués « par roulement », pour respecter un protocole sanitaire qui limite le nombre d’enfants par classe à quinze en élémentaire, à dix en maternelle, et n’autorise nulle part un accueil « comme avant ».
Seule certitude : pour l’heure, 20 % des écoliers seulement, soit 1 350 000, ont pu reprendre le chemin de l’école, et 30 % des collégiens. « Nous voudrions que certains enfants aillent à l’école et nous n’y arrivons pas », a reconnu le ministre de l’éducation nationale, Jean-Michel Blanquer, ces derniers jours. Le gouvernement avait pourtant livré une feuille de route : reviendraient en priorité les écoliers des « classes charnières » (grande section, CP et CM2) et ceux identifiés comme en difficulté sociale et scolaire. Ces derniers ne se bousculent pas dans les classes, affirment les directeurs d’école, qui continuent de battre le rappel des troupes.
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