Bras de fer sur la revalorisation des soignants dans la dernière ligne droite
Syndicats et collectifs avaient appelé à manifester ce mardi. Le « Ségur de la santé », la négociation sur la revalorisation salariale des soignants, doit s'achever cette semaine, avec la présentation des conclusions de Nicole Notat vendredi.
Par Solveig Godeluck
Revaloriser vite et fort les rémunérations hospitalières pour ne pas susciter de déception . C'est la stratégie voulue par le gouvernement pour remercier des soignants après l'épidémie de coronavirus. Las, les 6,5 milliards d'euros mis sur la table par le ministre Olivier Véran la semaine dernière, n'ont pas assouvi la soif de reconnaissance des blouses blanches. S'estimant malmenées depuis des années, elles sont redescendues dans la rue ce mardi à l'appel des syndicats et des collectifs de soignants et de médecins.
« Les 6 milliards promis à la fonction publique hospitalière sont loin de représenter 300 euros nets par mois » (soit la base des revendications), accuse Jean-Marc Devauchelle, de SUD Santé Sociaux, estimant par ailleurs qu'il faudrait plutôt 400 euros par mois, et 14 milliards au total. « Il est irréaliste de vouloir régler la question de l'hôpital public et des salaires en un temps si court », critique Mireille Stivala, de la CGT Santé Action sociale, qui voudrait « revisiter toutes les grilles salariales », revoir la formation professionnelle et le recrutement.
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« On est inquiets car on ne parle pas du retard de financement de l'hôpital, après dix ans de rigueur », ajoute Olivier Milleron, du collectif inter-hôpitaux. De fait, les trois autres « piliers » du « Ségur de la santé » lancé par le gouvernement -- l'investissement et le financement, le management, l'organisation territoriale - n'ont pas encore fait l'objet d'avancées très concrètes. L'animatrice de la concertation Nicole Notat devrait faire une synthèse lors de la réunion multilatérale avec les partenaires sociaux de vendredi. Emmanuel Macron pourrait ensuite s'adresser lui-même aux Français.
Ultimes négociations
Après la mobilisation réussie du 16 juin , cette nouvelle journée d'action était l'occasion pour les personnels hospitaliers de montrer leur détermination au moment où se noue une négociation cruciale pour leur avenir. Une opportunité telle que le « Ségur de la santé » ne se représentera pas de sitôt. Les montants en jeu sont déjà historiques. Les deux revalorisations centrées sur la fonction publique hospitalière (1,2 million de salariés) de 1991 et 2000 avaient coûté chacune environ 300 millions d'euros par an…
Les 6 milliards d'euros promis aux infirmiers, aides-soignants et personnels administratifs ou techniques doivent permettre de répondre à la demande de rattrapage général et immédiat, les salaires français dans le secteur de la santé ayant décroché de 15-20 % par rapport à la moyenne de l'OCDE. Certains métiers, notamment en début de carrière, bénéficieront d'un coup de pouce supplémentaire. Les établissements obtiendraient aussi des marges de manoeuvre pour rémunérer au mérite. La ventilation des 6 milliards va être négociée ce mercredi avec les partenaires sociaux.
Refonte de la grille
Par ailleurs, les 100.000 praticiens hospitaliers (45.000 équivalents temps plein), qui n'appartiennent pas à la fonction publique hospitalière, se sont vu proposer 300 millions d'euros de revalorisations par an et devraient en rediscuter jeudi . L'essentiel passera par une hausse de 150 euros par mois d'une prime réservée aux médecins qui ne pratiquent pas de dépassements d'honoraires. La refonte de la grille engagée en novembre va se poursuivre, avec de meilleurs salaires à l'entrée et en fin de carrière… sans plus de précisions.
Les internes en médecine ont quant à eux obtenu 150 millions d'euros par an, avec une revalorisation dès septembre : en première année, ils gagneront 140 euros bruts de plus par mois, à 1.531 euros ; en cinquième année, ce sera 107 euros, à 2.244 euros. Les gardes de nuit et de week-end seront aussi revalorisées. Enfin, 50 millions sont prévus pour les étudiants en médecine et en santé.
Solveig Godeluck