Deux baccalauréats (le français et le bachibac espagnol) mention très bien n’auront pas suffi à Kenza pour intégrer l’un des sept Sciences Po de région (Aix-en-Provence, Lille, Lyon, Rennes, Toulouse, Saint-Germain-en-Laye et Strasbourg). Refusée d’office, la jeune fille incrimine la procédure de sélection exceptionnelle mise en place par ces établissements contraints d’annuler leur concours commun à cause du Covid-19.
En urgence, le réseau des Sciences Po de région a dû se rabattre sur l’examen des dossiers Parcoursup, seuls à même de départager les 10 000 candidatures pour 1 100 places offertes. Un algorithme a été mis au point, basé uniquement sur certaines notes de première et de terminale, le tout « redressé » en fonction des résultats de la classe. Aucune lettre de motivation n’a été prise en compte, celle-ci n’étant pas un prérequis lorsque les candidats se sont inscrits par le biais de Parcoursup en janvier à ce qui devait être un concours.
« Les modalités d’examen des dossiers m’ont vraiment déçue, dénonce Kenza. Elles ne tiennent aucunement compte de l’investissement et de la motivation du candidat. Dans mon cas, pour le bac ES, la moyenne en mathématiques compte, alors qu’il n’y a pas de maths à Sciences Po ! » Quant au système de pondération par rapport au niveau de la classe, « il m’a totalement desservie car le premier de ma classe, c’est un monstre, [grâce aux options] il a eu 21/20 au bac ! », s’énerve la candidate déchue.
La solution algorithmique mise au point par le concours commun interroge jusqu’aux candidats reçus eux-mêmes, comme Marco, qui intégrera Sciences Po Toulouse après un an de prépa littéraire à Béziers (Hérault). « En suivant l’algorithme, un de mes amis cumulait plus de points que moi. Pourtant, il s’est retrouvé 400 places derrière sur la liste d’appel ! Je ne vois pas comment c’est possible. Le jury a sûrement regardé aussi mes notes de prépa », conclut-il.
Le critère du lycée d’origine écarté
« Nous avons conçu cet algorithme en quinze jours et été d’une transparence totale. Notre but était de nous appuyer sur des éléments permettant d’objectiver les résultats des candidats », affirme le directeur de Sciences Po Lille, Pierre Mathiot, qui a reçu une centaine de récriminations de la part de parents étonnés que leur enfant ne soit pas sélectionné. « C’est l’effet contrôle continu qui a joué. Avoir 15 de moyenne au lycée ne suffit pas pour être classé, on a plutôt des élèves avec 19 de moyenne. »
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