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La loi Recherche dans la dernière ligne droite, malgré les contestations

Le projet de loi de programmation pluriannuelle de la recherche doit être présenté en Conseil des ministres mi-juillet. Il prévoit des moyens en hausse à partir de 2021 et jusqu'en 2030, mais suscite une vague importante de contestations. Les opposants au projet y voient une intention de « détricoter » le statut des enseignants-chercheurs.

Plusieurs syndicats et collectifs avaient appelé à un rassemblement le 18 juin, à Paris, pour exiger le retrait du projet de loi sur la recherche.
Plusieurs syndicats et collectifs avaient appelé à un rassemblement le 18 juin, à Paris, pour exiger le retrait du projet de loi sur la recherche. (Thomas SAMSON/AFP)

Par Marie-Christine Corbier

Publié le 6 juil. 2020 à 09:45Mis à jour le 7 juil. 2020 à 15:52

Mettre 25 milliards d'euros sur la table pour la recherche des dix prochaines années et déclencher un puissant vent de contestation . C'est la situation dans laquelle se trouve l'exécutif, alors que le projet de loi de programmation pluriannuelle de la recherche doit être présenté en Conseil des ministres mi-juillet. L'annonce de cette loi avait été faite par Edouard Philippe en février 2019 . Il ne faut « pas seulement plus de moyens, mais travailler aussi sur nos propres barrières et donc sur des réformes profondes », avait indiqué Emmanuel Macron, fin 2019, lors des 80 ans du CNRS .

Le projet de loi est d'abord budgétaire, insistait l'exécutif avant le remaniement. « La France décroche », admet l'exposé des motifs du texte. En 2000, les pays européens s'étaient fixé un objectif de recherche global équivalent à 3 % de leur PIB. La France n'est qu'à 2,2 %, tandis que plusieurs de ses voisins ont déjà atteint voire dépassé cet objectif. Le projet de loi fixe des paliers d'augmentation pour que le budget de la recherche publique atteigne 1 % du PIB - il est aujourd'hui de 0,7 % -, objectif auquel la France s'était engagée en 2000 puis en 2009, sans jamais l'atteindre.

Un « repyramidage » des carrières

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L'exécutif a promis 5 milliards d'euros de hausse par an à l'issue de la période 2021-2030. Mais les sommes les plus importantes sont prévues après le quinquennat, ce qui alimente les critiques et les doutes. Pour 2021, l'enveloppe, en cours de discussion, serait de 400 millions seulement. Elle doit permettre de revaloriser les jeunes chercheurs - qui ne seraient pas embauchés en dessous de l'équivalent de deux SMIC. « La rémunération en début de carrière des scientifiques, recrutés à partir de 1,4 SMIC à l'âge de 33 ou 34 ans, est inférieure de 37 % à la moyenne des pays de l'OCDE », justifie le projet de loi. Il en découlerait, pour les chercheurs plus âgés, un « repyramidage » des carrières, avec 640 millions d'euros de primes sur les sept prochaines années. Une part croissante du financement passera par les appels à projets de l'Agence nationale de la recherche. Leur taux de succès doit être porté à 30 %, contre 16 % aujourd'hui, pour que la France se rapproche des « standards internationaux ». Les opposants au texte dénoncent, eux, l'insuffisance des financements consacrés aux crédits de base des laboratoires.

« Tenure track »

Au-delà de la question financière, les polémiques se concentrent sur le volet ressources humaines du texte. Au coeur de la contestation figurent les chaires de professeur junior. Cette nouvelle voie de recrutement contournerait celle, traditionnelle, de la fonction publique. Elle déboucherait sur des contrats de trois à six ans pour des chercheurs qui, à l'issue de cette période, pourraient être titularisés dans un corps de professeur des universités ou de directeur de recherche. Le gouvernement y voit un « complément » à la voie classique des concours. Les universités et organismes de recherche pourraient demander à en bénéficier « pour des postes particuliers correspondant à leur stratégie scientifique ou d'attractivité internationale », pour 25 % de leurs recrutements annuels. Il ne s'agit « pas de supprimer des postes de maîtres de conférences ou de chargés de recherche », insistait-on au ministère avant le remaniement .

Le collectif des facs et des labos en lutte, à la tête de la mobilisation contre le projet de loi, voit au contraire dans cette « tenure track » (course vers la titularisation) inspirée des Etats-Unis un moyen de « détricoter » les statuts des enseignants-chercheurs.

CDI de mission scientifique

Un autre point de crispation tient à la création de contrats à durée indéterminée de mission scientifique. La logique du projet de loi est de permettre l'allongement des contrats actuels pour les « faire coïncider avec des projets de recherche qui ont vocation à s'inscrire dans la durée ». Les défenseurs de cette mesure parlent de « sécurisation » et de facilitation de la vie des laboratoires qui doivent souvent se séparer, au bout de trois ans, de personnes recrutées en CDD et formées. Les opposants, eux, dénoncent une précarité accrue, avec des CDI qui pourront être rompus à l'issue du projet. Si tant est que le projet de la loi reste en l'état après le remaniement...

Marie-Christine Corbier

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