BLOG - Étudiante en troisième année de Science politique et en situation de handicap moteur, je suis accompagnée 24h/24 d’une équipe d’auxiliaires de vie qui m’assiste dans tous les gestes quotidiens.
La journée du 16 mars dernier, où courrait la rumeur d’un confinement annoncé le soir par le président de la République, a été une grande journée d’incertitude et de stress. En effet, outre l’angoisse de devoir rester enfermée et d’être victime de la maladie, j’avais également peur d’être contrainte de devoir être prise en charge par ma famille et, donc, de ne pas avoir l’opportunité de passer mes examens.
Peu après 20h, j’ai été soulagée en apprenant que les déplacements seraient autorisés dans le cas où le télétravail serait impossible. Cependant, les huit semaines de confinement n’ont pas été dénuées de stress ni d’angoisse.
Effectivement, ce secteur professionnel ayant de grandes difficultés à recruter dû à un manque de reconnaissance et de valorisation des métiers du care (soin), mon équipe d’auxiliaires de vie, s’est rapidement réduite à trois intervenantes au lieu des cinq nécessaires.
Un confinement sous double tension
Ce manque d’effectif a poussé certaines auxiliaires de vie à doubler leur temps de travail, allant bien au-delà des 48h semaine, représentant le temps maximal de travail réglementaire en France. Ainsi, j’espérais tous les jours qu’il n’arrive rien à l’une d’entre elles pour ne pas aggraver cette situation difficile.
Le premier mois comme la plupart de la population, les auxiliaires de vie n’avaient pas de matériel de protection. Mi-avril, lorsqu’elles ont eu le droit de retirer neuf masques par semaine en pharmacie, certaines d’elles se sont fait insulter par des clients qui leur reprochaient de les avoir gratuitement!
Cette attitude illustre la considération qu’a la société envers les auxiliaires de vie. Pourtant, le secteur de l’aide à domicile est voué à se développer afin de faire face à la dépendance. En effet, d’ici 2030, ce secteur doit recruter 250.000 collaborateurs pour répondre à la demande qui ne cessera de s’accroître.
Néanmoins, il serait très difficile de développer le secteur de l’aide à la personne si les auxiliaires de vie ne perçoivent pas la prime exceptionnelle de l’Etat liée à la crise sanitaire du covid-19.
Effectivement, bien qu’un communiqué du gouvernement annonçait le 11 mai dernier le versement de la prime exceptionnelle aux services d’aide et d’accompagnement à domicile, le gouvernement semble s’être ravisé en réduisant ce versement au seul personnel hospitalier ayant travaillé du 1er mars au 30 avril.
Ainsi, comment se prétendre être une société inclusive quand 4,3 millions de concitoyens ont besoin d’être accompagnés dans les gestes du quotidien mais que cet accompagnement n’est pas stable ou qu’il ne s’inscrit pas dans la pérennité? Cette précarisation influe négativement sur l’insertion dans la société et le développement des personnes en situation de handicap.
En effet, les personnes handicapées, pour évoluer dans leur vie, ont besoin, plus que tout, de repères, de stabilité et de pérennité dans leur accompagnement. Pour ces raisons, il me semble indispensable de revaloriser le métier d’auxiliaire de vie et d’inscrire la prise en charge de la dépendance au centre du projet de société de demain.
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