ÉTUDES - “J’étais très stressée, dès que j’ouvrais ma boîte mail, j’avais peur de recevoir un mail de l’université me disant que c’était annulé.” Eugénie, étudiante en école d’ingénieur, n’est pas la seule dans cette situation. Avec la crise du coronavirus, ceux qui avaient prévu de passer un semestre ou un an dans une université à l’étranger se retrouvent dans l’incertitude. Pourront-ils partir? Sous quelles conditions?
Les étudiants français sont de plus en plus nombreux à suivre des cours hors Hexagone. En 2016, plus de 90 000 d’entre eux ont choisi de partir en mobilité diplômante. Une part importante de ces échanges est favorisée par le programme Erasmus+. Grâce aux nombreux accords entre les pays membres de l’Union européenne, ainsi que l’Islande, le Liechtenstein, la Macédoine du Nord, la Norvège, la Serbie, la Turquie et le Royaume-Uni, la France constitue le premier pays d’envoi d’étudiants en programme Erasmus+, avec 57 087 étudiants en échange en 2019.
Parmi eux, dès la rentrée de septembre 2020, Eugénie doit partir en Suède, tout comme Félix. De son côté, Noémie a choisi l’Écosse et Thibault l’Italie. Hors Europe, Isaure s’est tournée vers Madagascar, quand Marcus a préféré la Chine. Mais le coronavirus a fait vaciller leurs rêves d’ailleurs.
L’incertitude
Marcus doit partir à Shanghai dans le cadre de son diplôme. Sélectionné il y a plus d’un an, et inscrit dans le processus administratif en avril, il est dans l’attente depuis. En effet, l’entrée en Chine continentale est suspendue pour les ressortissants étrangers depuis le 28 mars dernier.
“Je suis dans un état d’esprit où je me dis que je peux peut-être y aller si la situation s’arrange, mais si c’est pour me mettre en quarantaine, est-ce que ça vaut le coup? Est-ce que j’aurais l’occasion de voyager? Est-ce qu’en cas de problème, je pourrais rentrer en France?” Autant de questions qui restent pour l’heure sans réponse.
Thibault, lui, a déjà vu son semestre à l’étranger être reporté. Accepté à Bologne en Italie pour la rentrée prochaine, le confinement a changé ses plans. Et ce même si la Commission européenne a annoncé que les apprenants Erasmus+ pourront participer dès septembre à des mobilités hybrides, avec un apprentissage à distance organisé par l’établissement d’accueil et une mobilité physique à une date ultérieure. “J’ai discuté avec la responsable de mon master, et je me suis rendu à l’évidence que c’était plus prudent de le faire en janvier. J’étais un peu déçu, mais il n’est pas annulé, ça m’aide à rester positif.”
Une sentiment de frustration
Même chose du côté d’Isaure, 19 ans. “Quand j’ai su que j’étais prise à Madagascar en janvier dernier, c’était génial, je pouvais cocher une case de mon avenir, celle des voyages.”
Mais la jeune fille apprend trois mois plus tard que son échange universitaire est repoussé à février 2021, entre autres car les frontières entre la France et Madagascar ne rouvriront pas tout de suite. ”Ça m’embête, c’est frustrant, comme je m’imaginais partir dès août, même si je comprends qu’il n’y ait pas d’alternative possible.”
Dans une interview accordée au Parisien le 7 mai dernier, Frédérique Vidal, ministre de l’Enseignement supérieur, a indiqué qu’il fallait ”être prudent et envisager d’organiser les mobilités hors espace européen plutôt au 2e semestre qu’au premier”. Pour autant, “là où existent des partenariats entre universités et si les sites partenaires sont ouverts et accessibles en toute sécurité, les mobilités devraient pouvoir se tenir”.
Un report, c’est ce que souhaite Marcus. Car pour le moment, l’étudiant a du mal à savoir où il sera dans deux mois. “Ce qui m’énerve le plus, c’est que je n’arrive pas à me projeter. J’ai les deux options en tête, Shanghai et Paris, et la deuxième commence à prendre le dessus.”
Un échange universitaire sous conditions
Pour d’autres, le séjour à l’étranger a été maintenu malgré des procédures rallongées à cause de la pandémie. Début mars, Noémie apprend qu’elle a été acceptée à l’université de Saint-Andrews, en Écosse, pour un échange d’un an. ”À partir de là, l’université devait nous inscrire, mais à cause de la crise, il y a eu de gros délais, j’ai attendu trois mois avant d’avoir la confirmation. C’était frustrant parce que j’avais travaillé dur pour avoir mon Erasmus.
De son côté, Félix, 21 ans, a su le 28 mai qu’il partait à Chalmers University, en Suède. Après une longue période sans nouvelle, il apprend que son échange est finalement maintenu, comme celui d’Eugénie, qui craignait de voir son “séjour annulé, comme celui d’une de ses amies au Canada”.
Pour autant, certaines conditions viennent ternir l’idée qu’ils se faisaient d’un échange universitaire. Tout d’abord, les mesures sanitaires à respecter en rentrant dans le pays. “Quand je vais arriver au Royaume-Uni, je devrai me confiner pendant deux semaines chez moi, détaille Noémie. Or, je n’ai pas encore de logement, car l’université n’a pas pu étudier tous les dossiers. C’est assez flou, et ça m’angoisse.”
Deuxième problème, la majorité des cours se feront en vidéoconférence. “Seuls les travaux pratiques auront lieu sur place, mais le reste sera à distance, déplore Félix. Et comme je n’ai que quatre cours pendant le semestre, répartis sur deux périodes, je ne vais pas beaucoup aller en classe.”
Noémie, elle, ne connaît pas encore les modalités pour ses enseignements en Écosse. “Si j’ai des cours en visioconférence, sans vraiment se voir, alors que je serai à l’étranger, ça serait vraiment bizarre. J’espère que je vais quand même pouvoir socialiser avec des étudiants, car le but de l’Erasmus, c’est de faire des rencontres.”
Mais tous s’accordent sur un point. Ils n’ont qu’une hâte, Covid-19 ou non: découvrir un pays étranger.
À voir également sur Le HuffPost: Dans Parcoursup, ParcoursPlus est-il utile aux personnes reprenant leurs études?