Ségur de la santé : la crise sanitaire a accéléré la hausse des rémunérations des internes et des externes

Mersiha Nezic Publié le
Ségur de la santé : la crise sanitaire a accéléré la hausse des rémunérations des internes et des externes
Les accords du Ségur de la santé, signées à Matignon en présence notamment de Jean Castex, Premier ministre, et Olivier Véran, ministre de la Santé, prévoient la revalorisation des rémunérations des externes et des internes en médecine. // ©  HAMILTON/REA
L’ANEMF (l'Association nationale des étudiants en médecine de France), l’ISNI (l'Intersyndicale nationale des internes) et l’ISNAR-IMG (l'Intersyndicale nationale autonome représentative des internes de médecine générale) ont signé le jeudi 16 juillet l'accord du Ségur de la santé, à l’issue de huit semaines de concertations. Celui-ci acte la hausse des rémunérations des internes et des externes. La crise sanitaire a mis en lumière à la fois leur rôle essentiel dans l'offre de soins et la faiblesse de leurs indemnités.

"1,29 €/h plus jamais". Le hashtag, lancé sur les réseaux sociaux par l’ANEMF, l'Association nationale des étudiants en médecine de France, a fait du bruit en pleine pandémie du coronavirus. Le grand public découvrait qu’un externe (quatrième année) n'est payé que 1,29 € par heure. A la lumière de la crise sanitaire, la somme est apparue dérisoire vu la mobilisation des étudiants en médecine sur le front du Covid-19 dans les hôpitaux de France. Et ce ne sera effectivement "plus jamais" 1,29 €/h. Les externes et les internes bénéficient à partir de la rentrée d’une hausse de leur rémunération.

Une enveloppe de 200 millions d'euros

Leurs organisations représentatives - ANEMF (Association nationale des étudiants en médecine de France), ISNI (Intersyndicale nationale des internes) et ISNAR-IMG (Intersyndicale nationale autonome représentative des internes de médecine générale) - ont signé le jeudi 16 juillet l'accord du Ségur de la santé, à l’issue de huit semaines de concertations.

Le gouvernement débloque une enveloppe de 200 millions d'euros qui servira à augmenter les rémunérations de base des étudiants des filières médecine et paramédicales et des internes en médecine.

Les 34.000 étudiants-hospitaliers, de la 4e à la 6e année de médecine bénéficient d'une enveloppe de 55 millions d'euros. Lors de leur externat, ils effectuent des stages rétribués, pouvant se dérouler à mi-temps ou à plein temps par période. Pour les étudiants en 4e année de médecine, la rémunération de base devrait passer de 130 € à 260 € brut par mois, en 5e année de 250 € à 320 € et en 6e année de 280 € à 390 €.

L’ANEMF, avait demandé l’alignement du salaire des étudiants hospitaliers de 4e année a minima sur celui des étudiants stagiaires de l’enseignement supérieur, 390 € net mensuel, pour atteindre le SMIC horaire en fin de sixième année. La hausse reste en deçà des revendications de l’organisation étudiante mais constitue malgré tout "une avancée historique", saluée par l’ANEMF.

Les étudiants en santé et en particulier en médecine, ne comptent pas pour du beurre dans l’offre de soin. (P. Diot, Conférence des doyens des facultés de médecine)

Les 30.000 internes - dont le temps de travail réglementaire hebdomadaire est fixé à 48 heures mais qui en réalité sont mobilisés en moyenne 58 heures par semaine - voient aussi leur rémunération augmenter, de 5 à 10%, selon les années. Ils bénéficient d’une enveloppe de 124 millions d'euros dans le cadre du Ségur. Leur rémunération doit atteindre le SMIC horaire en fin d'internat, une revendication de longue date des syndicats. Concrètement, la rémunération passe en première année d’internat de 16.704 euros par an à 18.473 euros, et de 25.653 euros à 27.080 en cinquième année. Les gardes sont également revalorisées de 25%.

"Les circonstances ont accéléré la prise de conscience qui commençait à poindre : les étudiants en santé et en particulier en médecine, ne comptent pas pour du beurre dans l’offre de soin", explique Patrice Diot, président de la Conférence des doyens des facultés de médecine. La crise du Covid-19 a mis en lumière leur rôle "essentiel dans la chaîne de l’offre de soins, et a contribué à ce que le Ségur de la santé s’empare du sujet, aboutissant à une augmentation, indispensable et urgente".

Le Ségur de la santé a permis "d'aller plus vite et plus loin"

A Saint-Étienne, le 21 février dernier, Olivier Véran, alors fraîchement nommé ministre de la Santé, avait certes lâché du lest devant les médecins de demain réunis au congrès de l'Intersyndicale nationale autonome représentative des internes de médecine générale (ISNAR-IMG). Il avait promis une hausse des externes et des internes, mais sans avancer de sommes précises.

Les enveloppes mises sur la table sont plus importantes que ce que nous pouvions espérer avant la crise. (S. Villard, ANEMF)

La crise sanitaire puis le Ségur de la santé ont sans doute permis "d’aller plus vite et plus loin. Les enveloppes mises sur la table sont plus importantes que ce que nous pouvions espérer avant la crise. Et surtout, ces mesures seront appliquées dès la rentrée prochaine et à toutes les promotions", commente Sébastien Villard, ex-vice-président chargé des études médicales à l'ANEMF, qui a participé aux négociations.

Le ministre s’était également engagé à donner un coup de pouce financier aux internes en stage ambulatoire "dans les zones sous-dotées, qu’on appelle les déserts médicaux", et au strict respect du temps de travail et des repos de garde. A l’issue du Ségur de la santé, une indemnité forfaitaire d’hébergement de 150 euros brut mensuels est mise en place pour les stages ambulatoires en zone sous-dense pour les externes, et de 300 euros brut par mois pour les internes. Un groupe de travail planchera dès la rentrée sur l’épineux sujet du temps de travail.

Mersiha Nezic | Publié le