Dévoiler les coulisses de la création, tel est le pari de Plaine d’artistes, une manifestation gratuite organisée jusqu’au 2 août à La Villette. Aujourd’hui, l’envers du décor d’une création collective et éphémère (2/5).

C’est l’effervescence à la Grande Halle de La Villette. En ce jeudi 2 juillet – jour de lancement de « Plaine d’artistes », une manifestation dont l’ambition est de renouer le fil entre les artistes et le public en dévoilant les coulisses de la création – une partie des neuf plasticiens de la jeune génération est à la manœuvre. Leur objectif ? Réaliser avec « Les Moyens du bord » – c’est le titre de cette proposition coproduite par le Centre Pompidou et La Villette, qui ont mis à leur disposition des moyens matériels –  une œuvre éphémère.

Pour l’heure, la manifestation part dans de nombreuses – et passionnantes – directions. On peut voir Gaëlle Choisne évoluer au milieu d’un vaste dispositif en rhizome dont l’installation est déjà bien avancée. Situés tout à côté d’elle, Simon Rouby et Native Maqari préparent une performance tirée de Blackout, un projet questionnant la fonction symbolique de l’architecture qui a fondé leur collaboration en 2017. Et ce n’est qu’un début : une scène comme celle-ci, les visiteurs des « Moyens du bord » auront la chance d’en voir des dizaines d’autres tout au long du mois.

A la Grande Halle, on découvre une œuvre qu’on jurerait aboutie tant les éléments qui la composent – voix psalmodiées, lumières mystérieuses, chariots de projecteurs savamment installés – semblent définitifs

« Une ambiance avec un rythme lumineux et sonore »

Sur un des balcons de la Grande Halle, on découvre une œuvre qu’on jurerait aboutie tant les éléments qui la composent – voix psalmodiées et répétitives, lumières mystérieuses, chariots de projecteurs savamment installés dans l’espace – semblent pensés, pesés, définitifs. « Il n’en est rien », nous détrompe Julien Creuzet, le jeune auteur de ce travail, qui est également vidéaste, performeur et poète. « Il ne s’agit pas d’une œuvre aboutie, du moins pas encore, il s’agit plutôt, à ce stade, d’expériences consistant à donner une sorte d’écosystème, une ambiance avec un rythme lumineux et sonore ».

Il n’empêche, le jeune artiste est conscient de l’effet que cette « expérience » produit sur le visiteur. « Cette impression de travail accompli vient sans doute de ma pratique, qui essaie de se poser le plus possible la question des enjeux de la création, analyse-t-il. Autrement dit : pourquoi – et pour qui – je fais ce travail ». Parmi les prolongements qu’il envisage de donner à son travail, l’artiste mise notamment sur la contribution du pianiste Grégory Privat. « Une performance est d’ores et déjà prévue avec ce pianiste virtuose, détaille-t-il. Je vais peut-être pouvoir poursuivre la chanson « It’s you », dont on peut entendre le début, en injectant du texte, en l’étirant. Grégory va donner une voix, un corps, un instant au projet ».

 

Julien Creuzet

Travailler devant les visiteurs

Mettre en place son travail devant le public, c’est l'autre originalité de la manifestation. Pour Julien Creuzet, ces retrouvailles avec les visiteurs, qu’il a vécues avec « joie », sont l’un des éléments clés de la réussite du projet. « C’est un grand luxe de pouvoir observer la façon dont ils regardent, se déplacent », souligne le jeune artiste. Songe-t-il à intégrer cette dimension dans son travail ? « Personnellement, je connais la qualité du jeu de piano de Grégory Privat. Mais les enfants de six ans qui n’ont pas le même bagage musical, comment vont-ils appréhender la composante musicale de l’installation ? Cette question m’intéresse beaucoup ».

L’impact de l’incertitude sanitaire sur les visiteurs est une autre source d’interrogation pour le jeune artiste. « C’est une question qu’on ne peut pas évacuer, estime-t-il. J’ai rencontré des gens qui voient dans mon travail des choses qui seraient liées au Covid-19. J’ai pour principe de ne jamais contredire une interprétation ; en revanche, mon travail est d’éviter la mésinterprétation ». Pour les artistes comme pour les visiteurs, on le voit, « Les Moyens du bord » s’annoncent passionnants.  

 

« Les Moyens du bord », la création artistique en direct

Pour le volet arts plastiques de « Plaine d’artistes », l'établissement public du Parc et de la Grande Halle de La Villette et le Centre Pompidou s’associent pour offrir à neuf artistes, un espace propre à la réalisation d’une œuvre éphémère dans la Grande Halle de La Villette jusqu’au 2 août, date de clôture de la manifestation.

Une opération placée sous le signe de la célébration de la jeune création en France. Avec Gaëlle Choisne, Simon Rouby, Native Maqari, Julie Béna, Julien Creuzet, Mathieu Kleyebe Abonnenc, Anne Le Troter, Julien Prévieux et Maxime Rossi.