Il faisait une chaleur estivale, vendredi 11 septembre, quand Lou s’est préparée pour aller en classe. La jeune fille de presque 17 ans, qui préfère rester anonyme, est scolarisée dans un lycée de l’Essonne. « J’ai mis un pantalon taille haute, un crop top [un tee-shirt qui laisse voir le nombril] ras du cou et une chemise par-dessus », décrit-elle.
« Vers 15 h 30, j’ai croisé une AED [assistante d’éducation] qui m’a dit “je suis sûre qu’ils vendent des tee-shirts à ta taille au magasin”, poursuit Lou. Cette remarque m’a énervée. Mes amies avaient eu des réflexions du même genre plus tôt dans la journée. J’ai dit à voix haute, “c’est vrai que ça va faire bander les garçons”. »
Le lendemain, Lou poste sa photo sur Twitter, dans sa tenue de la veille, assortie de la mention « #balancetonbahut ». Apparu dans la soirée du 11 septembre, ce hashtag veut dénoncer le harcèlement, les agressions sexuelles et le sexisme dans les établissements scolaires, contre lequel certaines jeunes femmes ne se sentent pas protégées par les adultes. Rapidement, la teneur des témoignages s’est élargie à la question des règlements intérieurs sur la tenue, jugés discriminants envers les filles, contraintes de « se couvrir ».
Des dizaines de récits fleurissent alors sur Twitter, dont beaucoup accompagnés de photos où les jeunes filles – en général des lycéennes – montrent les tenues qui leur ont valu des remarques de la part des surveillants, conseillers principaux d’éducation (CPE), ou chefs d’établissement.
Insultes sexistes
La plupart des jeunes filles qui témoignent trouvent, comme Lou, que la tenue des filles est trop souvent considérée par les adultes de l’établissement comme « aguicheuse », « provocante » et susceptible d’« attirer le regard des garçons » ou de « les déconcentrer ». Beaucoup disent, en outre, subir des remarques et insultes sexistes de la part de leurs camarades. Selon certains témoignages, les adultes dédouanent parfois les garçons, en mettant en cause les tenues des jeunes femmes qui auraient « provoqué » les remarques…
« On doit arrêter de faire d’une fille, d’une jeune femme, d’une femme, un pur objet de désir sexuel » – Lou
« Il faut que les administrations scolaires arrêtent de dire aux filles qu’un tibia, une cuisse, un nombril, une épaule dénudée ou une bretelle de soutien-gorge sont des éléments qui excitent les garçons, s’agace Lou. En 2020, je trouve scandaleux que l’on puisse encore penser de cette façon. On doit arrêter de faire d’une fille, d’une jeune femme, d’une femme, un pur objet de désir sexuel. »
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