« Qu’est-ce qu’une crise ? » La question est posée aux élèves se préparant au concours de directeur d’établissement sanitaire, social et médico-social. Dans le grand amphithéâtre de l’Ecole des hautes études en santé publique (EHESP) de Rennes, quelques sourires s’esquissent sur les visages des étudiants. Tous ne savent pas ce qu’en dit le dictionnaire. En revanche, la crise, ces élèves l’ont déjà prise de plein fouet et ont dû apprendre à la surmonter : en mars, alors que les établissements de santé étaient menacés d’asphyxie, ils faisaient leurs premiers pas en tant que stagiaires dans l’administration hospitalière. « Une crise, c’est un défaut de préparation », reprend Bertrand Parent, professeur à l’EHESP. C’est aussi une expérience humaine, qui forge ou dénoue les vocations.
Dans cette grande école de la fonction publique, des étudiants se forment pendant deux ans, notamment lors de stages, aux rouages de l’administration hospitalière. Issus de masters universitaires ou d’instituts d’études politiques, cadres ou fonctionnaires en reconversion, ils sont répartis dans deux sections principales : « DH » (directeur d’hôpital), et « D3S » (directeur d’établissement sanitaire, social et médico-social).
La première chose qui a frappé ces futurs dirigeants pendant cette période exceptionnelle, c’est l’implication des personnels hospitaliers pour faire barrage à l’épidémie due au coronavirus. Au printemps, Aude Personnic, 26 ans et future « D3S », était en stage dans l’Aube, dans la région Grand Est. « Nous avons été très secoués, mais de manière positive, affirme-t-elle. Face au virus, tout le monde s’est mis en ordre de marche. Il semble que cela a apaisé les tensions habituelles entre les différents métiers. Nous avons vraiment travaillé ensemble. »
« J’ai vu des médecins aligner sans sourciller des gardes de douze heures », raconte Hugo Targhetta, 31 ans, en stage au centre de gérontologie du CHU de Nîmes. Les soignants ont enchaîné les heures sans les compter, pour faire face à l’urgence. « Quand la direction de mon établissement a décidé de bouleverser les temps de garde en les passant de sept heures trente à douze heures, cela s’est fait en quatre jours », témoigne Ronan Moulard, stagiaire dans un hôpital de proximité en Mayenne. « La grande implication de l’ensemble des acteurs a montré que l’hôpital n’est pas le monstre technocratique que l’on décrit souvent », estime Isaure La Fay, 47 ans, infirmière et elle aussi élève D3S.
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