Tribune. La période de confinement vécue au début du printemps a brutalement placé tous les élèves et professeurs en enseignement à distance d’une manière qui n’a pas grand-chose à voir avec l’enseignement à distance ordinaire. Si nous étions de nouveau confrontés à un enseignement à distance forcé, ou plus probablement hybride, il serait peut-être utile de connaître précisément les activités pédagogiques qui se prêtent plus ou moins bien à la distance.
Du côté des enseignants, la distance déporte les exigences pédagogiques vers l’amont (et vers l’aval) : ce qui est fait habituellement en classe doit être anticipé. Si les progrès des technologies de l’information et de la communication permettent d’interagir « en direct » avec les élèves ou les étudiants, la littérature empirique sur le sujet montre que ce n’est pas là qu’il faut attendre de fortes plus-values pour les apprentissages. Bref, les enseignants ne transposent pas à distance des situations d’enseignement en présence : ils conçoivent des solutions originales.
Du côté des élèves, la distance accroît les exigences : pour apprendre à distance il faut être plus autonome dans l’organisation de son temps et de ses apprentissages. Cette exigence est tellement forte qu’elle doit être soutenue par une solide motivation. Plus les élèves sont jeunes, moins ils sont autonomes, et plus ils doivent être encadrés, notamment par des consignes qui disent précisément ce qu’il faut faire et qui sollicitent parfois les parents.
N’ayant pas trouvé d’ouvrage sur la complémentarité entre présence et distance dans l’enseignement, j’ai exploré la littérature empirique sur les tâches les plus communément utilisées en enseignement, pour identifier celles qui sont les plus dégradées à distance et celles qui le sont moins.
Ce qui est plus difficile à distance
Écouter un cours est une activité des élèves où la régulation par le professeur est très importante. Un professeur qui fait cours ne fait pas que parler et montrer. Il pose des questions, répond et suscite des questions, regarde ses élèves, jauge leur intérêt, accélère, ralentit, hausse ou baisse la voix, utilise ses bras, ses mains et les expressions de son visage, pour non seulement scander son discours mais illustrer, mimer, souligner, il capte le regard et l’attention d’une élève, il synchronise de façon très précise ce qu’il montre et ce qu’il dit, en fonction des réactions des élèves. Mais à distance toute cette régulation disparaît : il est impossible de voir correctement ses élèves dans une classe virtuelle. Les vidéos de cours enregistrées ne sont que de très pâles imitations de cours. Le professeur qui voudra que ses élèves écoutent un cours à distance est donc contraint d’accompagner cette activité de consignes précises en amont et en aval.
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