Certains étudiants ont reçu un kit de tests Covid avant la rentrée, d’autres ont dû rester cloîtrés deux semaines dans leur chambre avant de pouvoir assister aux premiers cours. Tous ont été incités, souvent en vain, à éviter les soirées ou les rassemblements dans les dorms (« résidences »). Et ceux-là sont parmi les plus chanceux. Cet automne, moins d’un tiers des campus américains ont fait le pari de l’enseignement en présentiel. La rentrée universitaire s’y est souvent révélée chaotique, alternant ouverture et fermeture en fonction du nombre d’étudiants contaminés par le coronavirus.
Pour la majorité des étudiants, privés de la vie communautaire typique des campus américains, le semestre d’automne se déroule donc à distance, sans accès aux laboratoires, aux bibliothèques ou aux activités sportives. Une poignée de jeunes Américains ont tenté d’échapper à cette situation en partant étudier à l’étranger, à l’instar de ces étudiants de l’université Johns-Hopkins qui ont rallié le campus italien de la prestigieuse université à Bologne, où les cours, pour l’instant, sont assurés en présentiel.
Dans ce contexte incertain, beaucoup craignaient un effondrement des inscriptions dans les quelque 3 000 universités américaines, qui comptent chaque année près de 20 millions d’étudiants. La baisse, réelle, est moins prononcée que prévu. Selon les dernières données du National Student Clearinghouse Research Center, le nombre d’étudiants, tous niveaux confondus, a baissé de 3 % entre 2019 et 2020. Mais la crise touche de plein fouet les étudiants en première année, dont les inscriptions chutent de 16 %.
Désaffection des « community colleges »
Les effets à long terme de ces tendances sur le niveau éducatif du pays et les changements durables dans les méthodes d’apprentissage sont pour l’instant difficiles à évaluer. Mais ils amènent les responsables d’université à s’interroger sur leur modèle économique. « L’enseignement supérieur américain traverse une crise existentielle », estime l’American Council on Education (ACE), qui rassemble les acteurs de l’enseignement supérieur, dans une lettre envoyée le 19 octobre aux élus du Congrès.
Les universités, déjà affectées ces dernières années par une baisse des effectifs et une diminution des financements publics, ne sont pas toutes touchées de la même manière. Les community colleges, ces établissements de proximité non sélectifs et bien moins chers que les universités, enregistrent la plus forte désaffection, avec une baisse globale des effectifs de 9 %, un chiffre qui monte à 23 % pour les inscriptions en première année. « Cette tendance est préoccupante, car, en temps de crise, les community colleges sont généralement ceux qui s’en sortent le mieux, relève Sarah Spreitzer, l’une des directrices de l’ACE. Nous espérons que les jeunes prennent une année sabbatique, et qu’ils reviendront l’an prochain. »
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