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Le Match

Ecole de commerce : pour ou contre le remboursement des frais de scolarité à cause du confinement ?

Chaque jeudi, c'est Le Match. On confronte deux opinions autour d'une question… et à vous de forger votre propre point de vue// Aujourd'hui, on vous propose un débat entre d'un côté les étudiants déçus de leur année dégradée et de l'autre, les écoles de commerce qui ne veulent pas concéder une baisse des frais de scolarité sous peine de fragiliser leurs finances.

La Toulouse Business School, l'ecole de commerce de Toulouse. Toulouse.
La Toulouse Business School, l'ecole de commerce de Toulouse. Toulouse. (20 MINUTES/FRED SCHEIBER/SIPA/1403041730)

Par Florent Vairet

Publié le 19 nov. 2020 à 09:08Mis à jour le 23 nov. 2020 à 11:27

Depuis quelques semaines, les pétitions affluent. Des étudiants demandent le remboursement partiel des frais de scolarité de leur école de management . Ceux de la Toulouse Business School ont été parmi les premiers à lancer l'offensive. « Depuis le début de l'année, tous les événements ont été annulés et la présence sur le campus est réduite de 50 % », pouvait-on lire dans la pétition qui a fini par être retirée à la suite d'une entrevue avec la direction de l'école. Une autre pétition, elle, encore bien en ligne, recueille à l'heure de la publication de cet article 18.494 signatures.

Rappelons que les étudiants d'école de commerce payent entre 15 et 20.000 euros une année de master. Ces frais ont presque doublé en dix ans . Le coût total d'un diplôme reste néanmoins très éloigné des tarifs pratiqués aux Etats-Unis ou en Angleterre.

S'ils acceptent un tel prix dans un pays où l'enseignement supérieur est considéré comme gratuit, c'est que ces écoles de commerce françaises sont reconnues pour leur forte employabilité et l'expérience internationale qu'elles proposent systématiquement à chaque étudiant.

Nous avons donc d'un côté des écoles qui mettent en valeur leurs dépenses, souvent incompressibles. Elles arguent qu'une baisse des frais de scolarités déstabiliserait leur modèle économique. De l'autre, des étudiants qui disent payer pour un service nettement dégradé par rapport au moment où ils avaient opté pour ces études.

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Pour - Pétition d'étudiants d'écoles de commerce

« Le déroulement de ce début d'année avec une mise en place massive des cours à distance, difficile à suivre, décourageant, corrélé à une incessante hausse des frais de scolarité des écoles de commerce pousse nombre d'élèves à s'interroger sur la légitimité du montant payé.

Qui plus est, nous payons plus cher que nos prédécesseurs pour des cours de moins bonne qualité : la généralisation du distanciel pose des problèmes de concentration et donc d'assimilation des cours, mais aussi pose de sérieux problèmes pour les travaux de groupes, nombreux en école. Avec les restrictions, des élèves n'ont pas pu librement avoir accès aux installations de l'école. Installations qu'ils payent pourtant.

Dans une autre perspective, l'année en cours est une véritable épreuve pour un grand nombre de familles. Premièrement, la majorité des élèves ont contracté des prêts pour financer l'école qu'ils rêvaient d'intégrer pour qu'au final cette dernière ne leur propose pas les cours de la manière qui était prévue. Mais, il ne faut surtout pas oublier la situation de beaucoup de parents, qui ont pu, dès mars, perdre leur emploi, en dépit des charges, loyers ou crédits qui doivent payer. De fait, puisque cette situation est susceptible de se répéter, une hausse des inégalités pourrait avoir lieu et la précarité étudiante pourrait prendre de l'ampleur avec des loyers à payer « pour rien » .

De fait, cette année provoque des risques importants de décrochage scolaire et de précarité étudiante qui poussent nombre d'élèves à demander aux grandes écoles de commerce un remboursement partiel des frais de scolarité. »

Si vous souhaitez signer la pétition, c'est ici .

Contre - Lettre ouverte de la Conférence des grandes écoles publiée le 12 novembre (Extrait)

« Il faut tout d'abord dire que le coût des études en écoles de commerce françaises ne couvre pas le coût réel moyen de formation des étudiants. Pour compenser l'écart entre prix facturés et coûts réels, les écoles françaises allaient, par le passé, chercher des compléments de financement en particulier auprès des Chambres de Commerce. Elles le font désormais, via la Taxe d'Apprentissage (TA), la formation continue et les financements privés. Le budget type d'une école de commerce est en moyenne composé de 70 % de frais de scolarité, 10 à 20 % de formation continue et 10 à 20 % de financements via la TA, les fonds privés, les alumni…

Nos établissements sont à but non lucratif pour la grande majorité d'entre eux. Nos écoles dégagent généralement un résultat économique positif (car elles sont bien gérées !) qui est entièrement réinvesti au profit de la pédagogie et de l'expérience étudiante. Contrairement aux établissements publics (universités et grande majorité des écoles d'ingénieur), elles ne reçoivent pas de dotations de l'Etat et doivent créer leurs propres ressources. Les écoles de commerce françaises payent donc tout : les bâtiments, les personnels, la technologie, les services supports, la recherche. […]

Que s'est-il passé en France depuis mars dernier ? Contrairement à ce qu'on pourrait penser, les cours à distance ne coûtent pas moins cher que les cours en présentiel. Dans les faits, ils coûtent même plus cher, et il est ici important de souligner que le surcoût n'a pas été répercuté dans les frais de scolarité.

Pourquoi ce surcoût ? Car les écoles françaises ont massivement investi non seulement dans les mesures sanitaires mais aussi et surtout dans des nouvelles technologies éducatives, dans le réaménagement de leurs espaces pédagogiques, pour mettre en place des cours en distanciel qui soient interactifs, qualitatifs et qui permettent aux étudiants aussi de travailler en groupes où qu'ils soient, en France ou dans le monde. […]

A la fin de l'année dernière, les étudiants avaient le même niveau de connaissances et de compétences que leurs prédécesseurs. Il en sera de même pour ceux de cette année : les maquettes des programmes sont respectées, ce sont les modalités de délivrance des enseignements qui changent pour partie avec le distanciel. Mais leur diplôme aura une valeur équivalente.

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Les écoles ont continué à avoir des relations internationales avec leurs partenaires académiques : à date, les partenaires européens sont ouverts (en partie), les partenaires hors Europe ont fermé leurs frontières en grande majorité. Partout où il est possible d'aller, les écoles françaises ont laissé les étudiants choisir. Elles ont aussi offert la possibilité de suivre un cours d'une université partenaire à distance. Cela offre une expérience pédagogique qui se rapproche fortement des situations professionnelles que les étudiants auront à vivre demain : management d'équipes à distance, multiculturalisme. […]

Enfin, certains étudiants reprochent aux écoles de ne pouvoir s'engager pleinement dans la vie associative. Pour autant les écoles ont laissé leurs campus ouverts et la possibilité pour les étudiants qui le souhaitent de venir travailler en petits groupes sur leurs sites et de continuer de gérer les associations. Elles accompagneront par ailleurs les nouvelles équipes associatives afin que les « passations » puissent s'effectuer dans les meilleures conditions. Bien entendu, le côté festif de la vie associative est diminué pour le moment, mais est-ce aux écoles d'en porter la responsabilité ? »

Florent Vairet

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