La réforme a fait naître beaucoup d’espoir : fondée sur deux nouvelles filières qui ont fait leur apparition à la rentrée, elle aspire à diversifier les profils et à donner aux études de santé un tour constructif, loin du couperet qu’incarnait la fameuse Paces, première année commune qui laissait sur le carreau la grande majorité des candidats au concours, parfois recalés pour un centième de point, après une, voire deux années d’études.
Baptisées Pass (pour parcours d’accès spécifique santé) et L.AS (licence avec option accès santé), ces deux filières sont chacune arrimées à une licence disciplinaire devant servir de parachute pour une réorientation des étudiants en cas d’échec à l’entrée dans l’une des cinq spécialités de santé : médecine, pharmacie, odontologie, maïeutique et kinésithérapie. Chaque étudiant dispose de deux chances : dès la fin de sa première année s’il se classe parmi les meilleurs de sa promotion ou plus tard, en fin de deuxième ou de troisième année de la licence passerelle qu’il a choisie.
Séduisant sur le papier, le nouveau schéma serait moins reluisant dans les universités. Trois mois après la rentrée, six organisations étudiantes tirent la sonnette d’alarme. Sur fond de crise sanitaire et de grande anxiété face à l’avenir, elles alertent surtout sur les loupés d’une réforme complexe aux nombreux angles morts. « Le gâchis humain » se poursuit, affirment les six organisations membres de la Fédération des associations générales étudiantes (Fage), dans un rapport remis jeudi 19 novembre à Frédérique Vidal, la ministre de l’enseignement supérieur et Olivier Véran, ministre de la santé. « Nous constatons tous les jours les inquiétudes des étudiants, leur appel à l’aide en quête de réponses et leur détresse psychologique, écrivent les auteurs. L’objectif de diminution des troubles psycho-sociaux par rapport à la Paces n’est pas atteint, bien au contraire. »
Réorientation compromise
Parmi les dysfonctionnements identifiés, le fait que les filières Pass et L.AS se sont « imposées » dans les facultés partenaires des départements d’études de santé sans que celles-ci en comprennent tous les enjeux. Des licences aussi diverses que la psychologie, les sciences de la vie, le droit, les mathématiques, la philosophie ou le sport, peuvent en effet constituer, en tant que « mineure » d’enseignement, un apport considérable pour un futur professionnel de santé. Mais l’ambition de diversifier les profils en alliant les sciences dures aux humanités nécessite des échanges constants entre départements universitaires, et ils feraient cruellement défaut. Certaines licences « semblent trop souvent oublier la présence d’étudiants aux aspirations et emplois du temps différents des étudiants en licence classique », déplore le rapport qui appelle à une meilleure communication entre composantes universitaires. « Des étudiants ont été obligés d’aller demander à quelle date démarrait leur option santé à des secrétaires administratives qui découvraient purement et simplement l’existence d’une L.AS dans leur fac », relate Mamadou Ndoye, vice-président de la Fage.
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