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Vers une réforme de l’éducation prioritaire

Le gouvernement lancera à la rentrée prochaine une expérimentation dans trois grandes villes. 354246484/Halfpoint - stock.adobe.com

Le ministère entend atteindre les 70% d’enfants pauvres qui ne sont pas scolarisés dans des établissements classés REP.

Le ministère de l’Éducation nationale a annoncé cette semaine le lancement d’une expérimentation en septembre 2021 dans les académies de Nantes, Lille et Aix-Marseille pour réformer le pilotage de l’éducation prioritaire.

Des «contrats locaux d’accompagnement» de trois ans seront signés avec des établissements scolaires. Les actuels réseaux d’éducation prioritaire (REP et (REP+) perdureront, parallèlement à ces expérimentations. S’inspirant de pratiques tentées antérieurement, cette politique entend introduire plus de souplesse dans l’allocation de moyens.

Il s’agit cependant d’une politique en trompe-l’œil, puisqu’une véritable réforme ne pourrait être instaurée qu’en 2023, à la fin de l’expérimentation, donc. Et à condition qu’Emmanuel Macron soit réélu. S’il met le sujet sur la table, ce projet permet surtout au gouvernement actuel de ne pas se frotter aux conséquences d’une réforme ultrasensible, impliquant nécessairement des entrées, mais aussi des sorties d’établissements des réseaux d’éducation prioritaire.

Très figée, cette carte repose sur une logique de zone territoriale. Une fois qu’un établissement scolaire y est entré, le plus souvent depuis de nombreuses années, difficile de l’en faire sortir, même si l’origine sociale des élèves s’est améliorée, car les professeurs y bénéficient de primes importantes et de conditions de travail améliorées, avec des classes allégées. Les dernières sorties de REP en 2014 ne s’étaient pas déroulées sans grincements de dents et manifestations. «Sans parler du mécontentement des élus locaux», note Sophie Vénétitay, du Snes, principal syndicat du secondaire.

Cette expérimentation tardive permet cependant de poser les jalons d’une future réforme. Les objectifs pédagogiques (dédoublements ou effectifs réduits, déploiement de dispositifs particuliers comme l’accompagnement éducatif, décharge horaire…) varieront selon les caractéristiques de chaque établissement. Les professeurs d’une école connaissant des problèmes d’attractivité dans un territoire désertifié pourraient par exemple obtenir une valorisation de carrière ou un bonus à la mobilité. Le ministère entend, grâce à ces contrats, atteindre des populations éloignées des REP et REP+, qui sont essentiellement concentrés dans les ghettos urbains. «Quelque 70% des enfants pauvres sont en dehors de l’éducation prioritaire, notamment dans les territoires ruraux», rappelle-t-on. «Par ailleurs, dit-on, si une usine ferme dans un territoire et que 20% de la population bascule dans le chômage, on ne peut pas facilement faire basculer les écoles en REP.»

«Une rupture profonde»

Ce projet a été vivement critiqué dans le milieu de l’éducation prioritaire. Pour le président de l’Observatoire des zones prioritaires (OZP), Marc Douaire, il traduit «un changement de philosophie» éducative. «Vouloir sortir d’une carte de l’éducation prioritaire constitue une rupture profonde», dans la mesure où, dès son origine, «cette politique de lutte contre les inégalités ciblait non pas des établissements scolaires mais des territoires», rappelle-t-il. Il craint un risque d’effacement des mesures de «priorisation en faveur des ghettos urbains au profit des territoires ruraux et de l’enseignement privé». Sophie Vénétitay critique, quant à elle, une perte de stabilité pour les équipes enseignantes, qui ne sauront pas si le contrat ne sera pas modifié l’année suivante.


» LIRE AUSSI - «La crise a mis en lumière les inégalités» dans les zones d’éducation prioritaires, selon Nathalie Elimas

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1 commentaire
  • Dennis Wilson

    le

    Ce chiffre de 70% d'élèves pauvres hors REP ne veut rien dire, tant les territoires ruraux sont vastes ! Ce qui compte, c'est la proportion d'élèves pauvres par classe !

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