Jaap Korteweg, l’amateur de viande qui a inventé le métier de «boucher végétarien»

Jaap Korteweg, le pionnier des ersatz de «viande», fête les dix ans de son entreprise. Même Burger King vend désormais des sandwichs fourrés avec ces substituts végétaux.

 Jaap Kortewegen, un agriculteur néerlandais qui a renoncé aux produits carnés, a ouvert en 2010 une petite « boucherie végétarienne » à La Haye (Pays-Bas).
Jaap Kortewegen, un agriculteur néerlandais qui a renoncé aux produits carnés, a ouvert en 2010 une petite « boucherie végétarienne » à La Haye (Pays-Bas). Vegetarian Butcher

    Il était, de son propre aveu, un « grand amateur de viande ». Le voilà auréolé d'un titre pour le moins paradoxal : inventeur du métier de « boucher végétarien ». La success story de Jaap Kortewegen, un agriculteur néerlandais qui a renoncé aux produits carnés, a fait le tour de la planète végane. « Un rêve devenu réalité », a-t-il expliqué à l'AFP, au milieu d'un champ où il construit sa future maison écoresponsable, au toit recouvert d'herbe.

    Il y a vingt ans, ce fils de fermier, qui a grandi dans la campagne néerlandaise au milieu des vaches, devient végétarien, choqué d'avoir dû stocker des cochons morts dans ses chambres froides lors d'une épidémie de peste porcine. Dix ans plus tard, en 2010, il ouvre une petite « boucherie végétarienne » à La Haye. Aidé des chefs cuisiniers, il y élabore des recettes avec l'ambition d'offrir des substituts aux carnivores les plus addicts. Ses proches n'y croient pas et se moquent gentiment. « Moi, j'ai pris ça au sérieux car je voulais créer une alternative à la viande industrielle », lâche-t-il. La suite va lui donner raison.

    L'élevage bovin très polluant

    Tandis que Jaap Korteweg joue sur son concept de boucher végétarien, se mettant en scène dans des publicités couteau à viande à la main et tablier maculé de jus de carotte, sa société s'agrandit.

    Habile, l'agriculteur va surfer sur la vague végétarienne avant l'heure, puis être littéralement propulsé par l'urgence climatique, l'élevage apparaissant de plus en plus aux yeux du grand public pour ce qu'il est : une industrie très polluante. Selon l'ONU, il génère 14,5% de nos gaz à effet de serre.

    En 2018, son entreprise est rachetée par le géant de l'agroalimentaire Unilever, qui la place au cœur de sa nouvelle stratégie. Tout un symbole, la marque, dont les produits sont disponibles dans quelque 20 000 points de vente à travers 30 pays, a récemment conclu un accord pour fournir à Burger King une version végétarienne de son emblématique « Whopper » en Europe, au Moyen-Orient et en Afrique.

    Est-ce du « greenwashing », c'est-à-dire un vernis écologique pour séduire les consommateurs ? Jaap Korteweg rejette les critiques selon lesquelles Unilever tenterait de verdir son image tout en restant une source majeure de pollution plastique. En tout cas, la multinationale a flairé le potentiel de ces produits. D'après JPMorgan, le marché de l'ersatz de viande pourrait atteindre 100 milliards de dollars d'ici quinze ans.

    Pionnier, le Boucher végétarien, la marque, rivalise désormais avec Impossible Foods, dans lequel a investi le magnat britannique Richard Branson, et Beyond Meat, financé en partie par le milliardaire Bill Gates.

    Depuis la vente de sa société, Jaap Korteweg a pris un peu de recul. Unilever a nommé un nouveau PDG pour superviser l'expansion mondiale de la marque. L'ancien fermier reste malgré tout le visage de la compagnie, et consacre désormais la plupart de son temps à l'agriculture durable.