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L’organisation apprenante, une alternative à la gestion des effectifs par l’âge

Les Rencontres RH se sont tenues le 8 décembre sur l’emploi et ses perspectives, dans le contexte de crise lié au Covid.

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Publié le 16 décembre 2020 à 06h00, modifié le 16 décembre 2020 à 06h01

Temps de Lecture 4 min.

Comment les entreprises envisagent-elles la gestion de leurs effectifs en 2021 ? Cette question délicate a été posée mardi 8 décembre à un parterre de DRH réunis dans le cadre des Rencontres RH. Le rendez-vous mensuel de réflexion sur l’activité du management organisé depuis près de deux ans par Le Monde en partenariat avec LinkedIn et ManpowerGroup s’est tenu, malgré le Covid, pour la première fois à distance, non sans quelques difficultés qui ont contraint les échanges.

Néanmoins, la dynamique du dialogue a permis d’établir quelques tendances de fond : une baisse attendue des effectifs, une incitation aux départs qui pourrait logiquement concerner les seniors et surtout une progression de la mobilité interne. « Les fonctions RH sont confrontées à la nécessité d’adapter les effectifs aux difficultés, mais elles ont aussi la possibilité de créer les conditions propices à la transmission des compétences. La mobilité interne a d’ailleurs augmenté dans les entreprises en 2020 », remarque Florent Balayé, le responsable Talent Solutions de LinkedIn, sur la base d’une récente étude faite par le réseau social.

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« Les entreprises ont effectivement commencé à adapter leur effectif, confirme Dominique Brard, directrice générale Talent Solutions chez ManpowerGroup. Je travaille tous les jours sur les restructurations. Il y a eu en 2020 trois fois plus de ruptures de contrats de travail qu’en 2019, et ce n’est que la partie émergée de l’iceberg, puisque ça ne concerne que les entreprises ayant les moyens de faire des plans de sauvegarde de l’emploi. » 99 % des PSE initiés depuis le 1er mars concernent des entreprises de plus de 50 salariés, selon le bilan du 8 décembre du ministère du travail.

« Situation d’incertitude »

Sur la question de l’emploi, les responsables des ressources humaines sont rarement loquaces en période de crise. Dans un secteur qui se porte bien, comme le marketing numérique toujours en recherche de profils, le responsable du développement des talents monde de l’agence Artefact, Benoît Robin, a toutefois reconnu qu’en 2021, « on passera à une logique de prudence, liée aux activités de nos clients ».

L’entreprise qui se développe dans le e-learning, la publicité et le marketing digital n’est pas confrontée à la compression de personnel. Bien au contraire, comme tout le secteur des nouvelles technologies, sa problématique emploi consiste à garder ses compétences. L’arrêt de pans entiers d’économie crée des mobilités inter-filières. « On doit s’assurer que les profils restent chez nous », dit Benoît Robin.

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La société d’ingénierie Alten (80 % d’ingénieurs d’une moyenne d’âge de 30 ans), quant à elle, a pu transférer des compétences d’un secteur à l’autre. Mais « la capacité de mobilité varie selon les générations et ce sont les plus âgés qui sont susceptibles d’en profiter », note le directeur du recrutement Stéphane Dahan.

« Dans une situation d’incertitude, il faut s’adapter de manière permanente et donc adapter ses effectifs, rappelle la sociologue Anne-Marie Guillemard, spécialiste de la gestion des âges. Les employeurs ont toujours la tentation de se séparer des seniors, car ça permet de maintenir la paix sociale, dans la mesure où ils veulent souvent partir. On note un pic des ruptures conventionnelles autour de 59 ans. Ils ne seraient sans doute pas partis s’il n’y avait eu une pression de la part de l’entreprise. »

« Des mobilités ponctuelles »

L’approche est très française, note la sociologue. Dans les pays de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), c’est en France que la sortie du marché du travail est la plus précoce, à 60 ans contre 64,2 ans pour la moyenne de l’OCDE. Même si le report de l’âge légal de départ à la retraite a repoussé la sortie du marché du travail, ce n’est pas dans les mêmes proportions.

Pourtant c’est « une solution risquée », assure la sociologue, en particulier dans le contexte de crise sanitaire. La réduction d’effectif par l’âge « fait prendre le risque à l’entreprise de perdre le management intermédiaire dont elle a besoin pour ressouder les équipes à distance. Le défi de cette situation d’incertitude est de passer d’un management par l’âge à un management intergénérationnel, sans tomber dans le piège du tutorat qui oublie les âges médians détenteurs des compétences clés pour la transmission. La crise du Covid va sans doute nous aider à aller vers des organisations apprenantes ».

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A Paris, le Grand Palais, fermé comme tous les musées, en fournit un exemple. « Il n’existe pas de recette pour organiser la transmission intergénérationnelle, mais il y a des moments favorables, comme la formation ou la gestion de projets, témoigne Noëlle de La Loge, la DRH du Grand Palais. On a ainsi, dans le contexte de crise sanitaire, pu mettre en place des mobilités ponctuelles, car on a découvert que de jeunes salariés de l’accueil avaient les compétences nécessaires pour organiser les webinaires créés depuis le confinement ».

La variation des effectifs du Grand Palais est « légèrement en baisse, reconnaît toutefois Mme de La Loge, même si on recrute sur les achats et pour les travaux, mais notre axe a été de garder les compétences dans la maison. Le Châtelet a ainsi accueilli certains de nos personnels ».

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Pour Dominique Brard, de ManpowerGroup, « il est du devoir des entreprises d’assurer aux salariés une employabilité à vie. Si c’est à l’intérieur de l’entreprise, grâce à la mobilité, c’est très bien, mais aujourd’hui il y a des filières entières qui tombent, alerte-t-elle. Et oui, les seniors sont une variable d’ajustement, alors même que l’intergénérationnel est le fondement de notre modèle social ».

Les invités

Ont participé aux Rencontres RH du 8 décembre  : Florent Balayé, Business manager responsable Talent Solutions chez LinkedIn ; Dominique Brard, directrice générale ManpowerGroup Talent Solutions ; Stéphane Dahan, directeur du recrutement d’Alten ; Nicolas Delmas, directeur adjoint des ressources humaines de l’AP-HP Nord ; Anne-Marie Guillemard, sociologue, professeure émérite à l’université Paris-Descartes ; Noëlle de La Loge, directrice des ressources humaines de Réunion des musées nationaux-Grand Palais ; Benoît Robin, directeur développement des talents chez Artefact ; Anne Rodier, journaliste, Le Monde ; Gilles van Kote, directeur délégué, Le Monde.

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