Les petits patrons handicapés plus souvent fauchés que blindés

Publié le 17 décembre 2020 par Franck Seuret
64 % des travailleurs indépendants handicapés ont un chiffre d'affaires inférieur à 20 000 € par an. Mais le volume d'activité croît avec l'ancienneté de l'entreprise.

Une récente étude permet de dresser le portrait des quelque 75 000 travailleurs indépendants handicapés. Leur situation de handicap influe sur leur volonté de créer leur entreprise, l’orientation de leur projet… mais aussi leurs revenus, plus faibles que ceux des autres travailleurs indépendants. 

Ils sont leur propre patron. Mais cette autonomie a un prix. Seuls 29 % des travailleurs indépendants en situation de handicap gagnent suffisamment d’argent pour vivre de leur activité. Heureusement, plus l’ancienneté est importante, plus cette part augmente. Elle passe de 16 % pour les entreprises créées en 2020 à 41 % pour celles ayant vu le jour en 2017.

8 % des travailleurs handicapés en emploi sont indépendants

C’est l’un des principaux enseignements de l’étude de la Fondation Malakoff Humanis handicap menée auprès de 390 travailleurs indépendants handicapés (TIH).

Ces TIH représentent 8 % de l’ensemble des bénéficiaires de l’obligation d’emploi en poste. Qu’ils soient chef d’entreprise – une micro-entreprise très souvent, profession libérale, commerçant, artisan… Soit 75 000 entrepreneurs au total.

L’AAH ou une pension en complément

Et près de neuf fois sur dix, c’est leur seule activité. Seule une toute petite minorité la mène de front avec une activité salariée. Mais sans doute certains complètent-ils ces faibles revenus avec leur pension d’invalidité (19 % en son titulaires) ou l’AAH (22 % en bénéficient), cumulables sous réserve de ne pas dépasser certains plafonds de ressources.

« La seule solution si je voulais travailler. »

La plupart assurent avoir choisi cette solution pour être « autonomes dans leurs décisions ». Et pouvoir exercer un métier qui leur plaît. Leur situation de handicap a également pu être un déclencheur.

« Pour moi, c’était la seule solution si je voulais travailler », raconte Jérome, l’un des créateurs interrogés. Ce jeune homme, atteint d’infirmité motrice cérébrale, avait en effet essuyé plusieurs échecs en entreprise. « On me reprochait de ne pas être assez rapide. »

Un niveau de revenus très inférieur aux autres indépendants

Ces indépendants reconnaissant d’ailleurs que les difficultés liées à leur handicap – fatigabilité, troubles de concentration… –  constituent le principal obstacle au développement de leur activité. À égalité avec la conquête de nouveaux clients.

Ce qui explique sans doute que les TIH ont « un niveau de revenu moins élevé que les autres travailleurs indépendants ». Il est d’un tiers inférieur en moyenne. Et plus de 60 % déclarent moins de 20 000 € hors taxe de chiffre d’affaires par an.

Le handicap, frein et levier

Autre particularité : un indépendant sur trois travaille au développement d’un projet, d’un service ou de produits à destination des personnes en situation de handicap.

« Par de nombreux aspects, le handicap est très présent pour ces travailleurs, résume Franck Guichet, le directeur du bureau d’études emiCité, qui a mené les travaux. Comme objet même de leur activité souvent, comme frein parfois mais aussi comme levier potentiel. »

Les commandes déductibles de la contribution Agefiph

Depuis 2016, les clients peuvent en effet déduire de leur contribution à l’Agefiph une partie du montant des contrats de sous-traitance conclus avec des TIH. Au même titre qu’avec des entreprises adaptées et des Ésat.

L’étude montre que certains indépendants s’en servent comme argument commercial. « Ce qui était quelque chose que je devais cacher est devenu un véritable atout concurrentiel », raconte cet entrepreneur. Mais d’autres ne savent pas comment aborder le sujet : « C’est compliqué. Comment j’en parle ? »

Les auteurs de l’étude recommandent donc, entre autres, de « renforcer l’accompagnement des TIH ». Au tout début de leur parcours, notamment. Pour les aider à passer le plus rapidement possible la période des vaches maigres.

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