L’acquisition du diamantaire américain Tiffany par le groupe français LVMH, finalisée le 7 janvier pour un montant de 15,8 milliards de dollars (13 milliards d’euros), fera date dans le monde des joailliers. Précédé d’une intense bataille judiciaire menée par le français pour en faire baisser le prix dans le contexte de la crise sanitaire, le rachat de ce fleuron créé à New York en 1837, et connu dans le monde entier pour son « bleu œuf de merle », a tout d’un symbole. Il illustre les ambitions croissantes du numéro un mondial du luxe et de ses concurrents sur un marché qui promet d’être l’un des plus gros filons de croissance de la décennie.
Contrairement aux apparences, le bijou résiste encore à l’hégémonie des grands noms de la place Vendôme et de la rue de la Paix, où s’illustre la crème de la profession. En dépit de la puissance des Cartier, Tiffany, Chanel, Dior ou Louis Vuitton, l’écrasante majorité des bijoux vendus dans le monde sort d’ateliers anonymes et d’échoppes artisanales. Ces produits « sans nom » – no name, comme on les appelle dans le jargon du métier – représenteraient encore de 70 % à 80 % des ventes mondiales de bijouterie-joaillerie.
35,4 milliards de dollars pour 2020
La part revenant aux grandes marques est estimée par le cabinet d’études Euromonitor International à 35,4 milliards de dollars en 2020. Un chiffre exceptionnellement en retrait de 20,7 % en raison de la crise liée au coronavirus. La dynamique est pourtant clairement favorable aux marques qui grignotent inexorablement des parts de marché, notamment par le rachat de maisons de joaillerie traditionnelles.
Les LVMH, Richemont et autres Kering connaissent, dans la joaillerie, des « taux de croissance nettement supérieurs à la moyenne des produits de luxe », souligne Joëlle de Montgolfier, directrice des études « distribution et luxe » au sein du cabinet de conseil Bain & Company. Cette catégorie affichait ainsi l’une des meilleures performances de 2019, avec des ventes en progression de 12 %, contre 7 % pour l’ensemble du marché à taux de change courants.
S’assurer de la valeur d’une pièce, mais également connaître sa provenance exigera de plus en plus de « signer » les bijoux comme cela s’est imposé dans le vin ou la maroquinerie, argue Stanislas de Quercize, ancien PDG de Cartier et de Van Cleef & Arpels. Ces attentes, particulièrement fortes parmi les jeunes consommateurs de luxe, devraient encore permettre aux griffes « de doubler facilement leur part du marché de la joaillerie » dans le monde, pronostique Hubert Lapipe, à la tête de la Société 5, un cabinet d’études et de conseil spécialisé dans l’horlogerie-bijouterie.
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