Allocation

La généralisation de la «garantie jeunes» aux 16-25 ans les plus précaires sur la table du gouvernement

Un rapport remis au gouvernement plaide pour une extension de ce dispositif permettant aux jeunes sans emploi et hors études de toucher un peu moins de 500 euros par mois. La ministre du Travail a évoqué une «universalité» encore très floue. Tout en enterrant définitivement le RSA jeunes.
par Amandine Cailhol
publié le 7 janvier 2021 à 16h04

Pour le secrétaire général de la CFDT, Laurent Berger, invité mercredi sur RTL, il faut l'«universaliser». La ministre du Travail, Elisabeth Borne, elle, voudrait la rendre «systématique». Depuis quelques jours, la «garantie jeunes», dispositif visant les 16 à 25 ans qui ne sont «ni en emploi, ni en études, ni en formation», résonne comme un nouveau mantra. Créée fin 2013 et généralisée en 2016, la mesure qui conjugue une allocation mensuelle (d'un montant maximal de 497 euros pendant un an, renouvelable six mois) et un accompagnement intensif, à la fois individuel et collectif, fait aussi l'objet d'un rapport remis ce jeudi à la ministre du Travail, et à la secrétaire d'Etat chargée de la Jeunesse, Sarah El Haïry. Rédigé par le Conseil d'orientation des politiques de jeunesses (COJ), une instance consultative placée auprès du Premier ministre, ce dernier plaide pour une extension de la «garantie jeunes». Et propose d'en faire un «droit» ouvert à tous les jeunes précaires.

Revoir les conditions d’éligibilité

Citant un précédent rapport du service statistique du ministère du Travail (Dares), le COJ souligne l'efficacité du dispositif : fin 2019, 43,5 % des bénéficiaires ont accédé à un emploi, à une formation, à un contrat en alternance, ou à une création d'entreprise. Une «réussite», explique le rapport, qui repose notamment sur le volet accompagnement de la «garantie jeunes». Là où, pointe-il au passage, cet aspect fait défaut à d'autres dispositifs, comme le RSA.

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Reste que la «garantie jeunes», pour l'heure, ne concerne que peu de bénéficiaires, car les conditions d'entrée «excluent un certain nombre de jeunes précaires», selon Antoine Dulin, président du COJ. En 2019, on recense 100 000 bénéficiaires. En 2021, selon les vœux de la ministre du Travail, ce chiffre devrait être multiplié par deux. Mais pour le COJ, il faut aller encore plus loin. Pour élargir le spectre, le rapport propose donc de revoir les conditions d'éligibilité à l'aide. Parmi les pistes énoncées : la suppression du critère «sans emploi, ni études, ni formation», afin de faire entrer les jeunes ayant des petits boulots dans le dispositif. De même, il propose de ne pas limiter la durée à un an et de renforcer les missions locales en charge du dispositif, en leur octroyant de nouveaux personnels et locaux.

«Mieux qu’un RSA jeunes»

Un rapport qui tombe à pic, et pourrait constituer une porte de sortie pour le gouvernement qui refuse fermement d'ouvrir le droit au RSA dès 18 ans. Et ce alors que la mesure est réclamée par nombre d'acteurs de lutte contre la précarité. Le 20 janvier, une proposition de loi portée par le PS en ce sens sera d'ailleurs présentée au Sénat. Mais, note Laurent Berger de la CFDT, pourtant fervent défenseur de ce scénario, ce dernier souffre désormais d'une «logique dogmatique» bien trop ancrée. Pour le syndicaliste, qui était invité sur RTL mercredi, il existerait donc «une autre manière» de répondre à la précarité des jeunes : «Elargir, rendre universel la garantie jeunes.» Et d'ajouter : «Le gouvernement ne perdra pas la face en disant que ce n'est pas un RSA jeunes, mais on aura une solution pour les jeunes.»

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Invitée, la veille, sur France Info, la ministre du Travail ne semblait pas dire autre chose. «On veut mettre en place la garantie jeunes universelle», a-t-elle même déclaré, sans toutefois expliciter le degré d'«universalité». Le but : «Que chaque jeune qui est accompagné par une mission locale, par Pôle emploi, par l'Association pour l'emploi des cadres, puisse avoir une rémunération». Une solution «mieux qu'un RSA jeunes», a-t-elle insisté, car elle permet d'«armer [le jeune] pour gagner son autonomie et rentrer dans l'emploi». Reste à savoir si Elisabeth Borne et Laurent Berger parlent la même langue quand ils évoquent l'«universalité» de la mesure.

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