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« A l’exception des professeurs de la discipline de documentation » : il n’aura fallu que quelques jours, au début du mois de décembre 2020, pour que cette petite phrase, glissée dans un décret octroyant une prime d’équipement informatique à tous les enseignants, enflamme et rende visible un groupe professionnel qu’on entend rarement dans la grande maison éducation nationale : celui des professeurs-documentalistes.
Leur réaction, notamment sur les réseaux sociaux, est à la hauteur du manque de reconnaissance régulier exprimé par la profession, forte de quelque 12 000 « profs-docs » (sur environ 470 000 enseignants du second degré public et privé). Alors que des discussions doivent avoir lieu prochainement avec le ministère pour réfléchir à une prime spécifique, certains ont prévu de faire entendre leurs voix à l’occasion de la mobilisation intersyndicale du 26 janvier.
Fin janvier, la pétition « Reconnaissance du métier de professeur documentaliste » lancée, dans la foulée de l’annonce du versement de la prime informatique, par Ophélie D. (qui souhaite garder l’anonymat), enseignante dans l’Oise, approchait 24 000 signatures. « Cette histoire de prime informatique, c’est la goutte d’eau. Le manque de reconnaissance vient de loin…, ne décolère pas celle qui est enseignante depuis seulement trois ans. Cela fait maintenant plus de trente ans que les professeurs-documentalistes passent le concours du capes comme tous les autres professeurs, et il nous faut encore quasi quotidiennement faire comprendre qu’on est enseignant, nous aussi, qu’on a bien une mission pédagogique “face” aux élèves. La caricature de la “dame du CDI”, c’est fini ! »
Le ministre de l’éducation nationale, Jean-Michel Blanquer, avait en effet expliqué fin novembre que la prime informatique, envisagée après les affres de l’enseignement à distance du premier confinement, serait réservée aux enseignants « qui sont devant les élèves »…
Education à l’information
Comme d’autres professeurs-documentalistes interrogés par Le Monde, Ophélie D. déplore une « image périmée » de son métier, dont les missions vont depuis longtemps au-delà de la simple gestion du centre de documentation et d’information (CDI).
C’est en 1989 que l’accession des anciens « documentalistes-bibliothécaires » au titre de professeur est venue acter leur mission pédagogique première : apprendre aux élèves le b.a.-ba de la recherche de documents et d’informations. « Ce rôle sera renforcé par l’émergence d’Internet dans les années 1990, puis des “sciences de l’information et de la communication” auxquelles sont formés les documentalistes depuis 2001 », rappelle Florian Reynaud, enseignant à Vonnas (Ain) et membre du bureau national de l’Association des professeurs-documentalistes de l’éducation nationale (Apden). Cette expertise et ces évolutions vont progressivement orienter leur mission pédagogique vers le champ plus large de l’éducation aux médias et à l’information (EMI).
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