Pourquoi tant de réticences à un RSA jeune ?

Rassemblement de jeunes militant pour l'ouverture du RSA aux moins de 25 ans, le 19 janvier 2021 ©Maxppp - Sadak Souici
Rassemblement de jeunes militant pour l'ouverture du RSA aux moins de 25 ans, le 19 janvier 2021 ©Maxppp - Sadak Souici
Rassemblement de jeunes militant pour l'ouverture du RSA aux moins de 25 ans, le 19 janvier 2021 ©Maxppp - Sadak Souici
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Le rejet au Sénat d'une proposition de loi visant à établir un RSA pour les jeunes de moins de 25 ans ravive le débat sur leur accompagnement financier et humain. Comment endiguer efficacement une précarité croissante ?

Avec
  • Mélanie Luce Présidente de l'UNEF
  • Camille Peugny Sociologue, professeur à l'Université Paris-Saclay et chercheur au laboratoire PRINTEMPS (professions, institutions, temporalités)
  • Stanislas Guérini Ministre de la Transformation et de la fonction publiques

"Garantie Jeunes", "Garantie Jeunes Universelle", "1 jeune 1 solution" et maintenant "Capital jeune", un prêt de 10.000 € à taux zéro : les dispositifs développés depuis l’été dernier pour soutenir les jeunes face à la crise de la Covid sont nombreux mais évitent tous d’étendre, comme le demande l’opposition, les syndicats étudiants et la CFDT, le RSA aux 18-25 ans.

Pourquoi cette réticence ? Serait-ce moins efficace ? Est-ce par crainte d’un assistanat qui, comme l’a dit le ministre de l’économie Bruno Le Maire, ne serait pas une bonne politique car ce qu’on veut à 18 ans, c’est travailler ?

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Il faut dé-familiariser les aides sociales. - Mélanie Luce

De concert avec Mélanie Luce, Camille Peugny évoque une certaine conception de la jeunesse, qui sous-tendrait l’organisation des aides accordées : 

En France, les jeunes, même après 18 ans, sont considérés comme les enfants de leurs parents. Ce qui explique qu’on mette des aides sous condition de ressources jusqu'à 25 ans. Oril n'y a pas vraiment de raisons objectives de considérer que le RSA pourrait être une solution pour les plus de 25 ans et n'en serait pas une pour les moins de 25 ans.

Afin de d’aider les jeunes sur le court et long-terme, la proposition du gouvernement, portée par Stanislas Guerini serait d’étendre la « Garantie Jeunes » et d’y additionner le « Capital Jeune » :

On propose de donner aux jeunes la possibilité d'avoir accès à un capital de 10.000 euros - le montant en moyenne des emprunts étudiants, qu'on ne rembourserait que si l’on atteint un certain niveau de revenu_._ C’est un message d’encouragement et une mesure qui vise à résorber les inégalités de départ.

Mélanie Luce y voit surtout le risque d’accentuer ces inégalités :

On va avoir une situation similaire à celle au Royaume-Uni, qui a c_ommencé comme ça, avec des prêts étudiants garantis par l'Etat, corrélé à une augmentation des frais d'inscription._

Pour Camille Peugny, la proposition "Capital Jeune" repose sur un schéma libéral, qui diffère des solutions adoptées ailleurs en Europe :

On observe dans les pays du Nord, une confiance en l’État et dans les jeunes : au Danemark, six ans de formation sont pris en charge pour tous les étudiants. Dans les pays libéraux, on choisit de faire confiance au marché, par des prêts étudiants ou le marché du travail. Tandis que dans les pays du Sud, on a confiance en la famille, qui prend en charge le coût de cette période. Et on observe très nettement dans ces deux dernières catégories une reproduction sociale beaucoup plus forte.

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