« Nous avons été confrontés à plusieurs reprises en 2020 au cas de figure où un seul candidat se présentait pour un poste de président de tribunal judiciaire », déplore Régis Vanhasbrouck, membre du Conseil supérieur de la magistrature (CSM) et premier président de la cour d’appel de Lyon. « Lorsque nous n’avons que deux ou trois magistrats, ce n’est pas optimal non plus en termes de choix pour trouver le meilleur candidat à des fonctions aussi importantes. »
Ce constat de la crise des vocations au sein de la magistrature pour certaines fonctions n’est pas nouveau, mais s’est aggravé depuis quatre ou cinq ans. Cela touche plus particulièrement les fonctions de président de tribunal judiciaire dans certaines cités de moindre importance comme Mende (Lozère), Sens (Yonne) ou Roanne (Loire). La tendance est la même, mais de moindre ampleur, pour certains postes de procureurs de la République.
Le ministère de la justice, pour les magistrats du parquet sur qui il a la main en termes de carrière, et le CSM, pour les magistrats du siège, cherchent à répondre à cette « très faible attractivité de certains postes de chefs de juridiction » – encore soulignée dans le dernier rapport d’activité de l’institution chargée de proposer les magistrats pour les fonctions de président de tribunal judiciaire, premier président de cours d’appel et magistrats du siège à la Cour de cassation –, et procèdent à plusieurs appels à candidatures, faute de postulant.
Mobilité géographique compliquée
Le groupe de travail chargé fin 2019 par Chantal Arens, présidente du CSM, de réfléchir à ce sujet a bouclé son rapport et devrait présenter ses vingt-cinq propositions fin février à la formation plénière de l’institution. L’une des explications au déficit de vocation tient, selon ce rapport, à l’évolution de la société où désormais les deux membres d’un couple travaillent, ce qui complique ainsi la mobilité géographique. Le célibat géographique, fréquent lorsqu’il s’agit d’éviter au conjoint une rupture de carrière et aux enfants un déménagement loin d’un grand centre urbain, « s’accompagne d’un appauvrissement économique et culturel qui renvoie ces présidents à une vie estudiantine peu valorisante et peu compatible avec de telles responsabilités », peut-on y lire.
Autre problème auquel la justice est confrontée alors que les trois quarts des magistrats sortant de l’école sont des femmes, la moindre mobilité géographique de ces dernières et peut-être aussi une moindre confiance en soi pour s’imaginer à des hauts postes. Selon le sondage mené au sein de la magistrature pour ce travail, 24 % des magistrates entre 40 et 50 ans souhaiteraient présider un tribunal dans les cinq ans à venir, contre 37 % de leurs homologues masculins du même âge.
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