Depuis Orléans, la liaison avec Victor, qui souhaite rester anonyme, est chaotique : la communication a encore été coupée. Son téléphone mériterait d’être changé mais ce n’est franchement pas d’actualité. Etudiant en deuxième année de DUT (diplôme universitaire de technologie) de chimie à Orléans, Victor a pour seule rentrée d’argent sa bourse mensuelle d’un montant de 250 euros. Celle-ci est calculée en fonction des revenus de ses parents – « sauf que je ne vois que ma mère, et qu’elle ne m’aide pas financièrement ».
Son loyer lui coûte 180 euros par mois : 9 mètres carrés dans une résidence du Crous sur le campus d’Orléans. « Il n’y a pas moins cher ! », indique le jeune homme. Avant que tout s’arrête, il y a un an, Victor enchaînait les missions en tant que « client mystère ». Mais cette source de revenu a disparu quand de nouvelles dépenses ont vu le jour : acheter des masques, trouver un ordinateur portable… Alors, il a fallu demander de l’aide aux associations. « Avant, c’était déjà un peu compliqué, mais pas comme aujourd’hui », résume-t-il.
Tandis que la précarisation d’une partie des étudiants s’accentue avec le Covid-19, une dizaine d’organisations de jeunesse appellent à la mobilisation, mardi 16 mars, réclamant un « plan d’urgence » de 1,5 milliard d’euros pour financer une augmentation « immédiate » des bourses et des aides au logement. « Le Covid-19 a mis en lumière les déficiences de nos aides sociales, tranche Mélanie Luce, présidente de l’Union nationale des étudiants de France (UNEF). Si la précarité des étudiants était une réalité depuis longtemps, notre système, défaillant et à bout de souffle, ne permet pas de tenir en temps de crise. »
Selon elle, le financement actuel des études est « insuffisant » puisque nombre de jeunes vivent sous le seuil de pauvreté. Il serait aussi « infantilisant », car calculé selon les revenus des parents. Et « incohérent » : « Avec la demi-part fiscale, l’Etat dépense autant dans l’exonération d’impôts des familles les plus riches que dans nos bourses. Cet argent devrait aller directement dans la poche des étudiants », invoque la présidente de l’UNEF.
« Lacune du système français »
Le grain de sable qui a fait dérailler la machine, c’est la disparition de la plupart des petits boulots des étudiants. En effet, 40 % d’entre eux avaient une activité rémunérée avant la pandémie, d’après l’Observatoire national de la vie étudiante (OVE). Ils ont donc subi une perte de revenus moyenne de 274 euros par mois. Sans ce filet de sécurité, la précarité de ces jeunes a bondi.
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