A l’issue de ses examens du premier semestre, Pauline* s’est autorisée ce qu’elle n’avait pas fait depuis la mi-août : voir son groupe d’amis, le temps d’un après-midi. « Cela s’est avéré désastreux, j’ai pleuré tout du long. Je ne me suis pas reconnue », confie la Montpelliéraine, étudiante en PASS, la nouvelle voie qui, avec les L.AS (une licence avec option santé), permet d’accéder aux études de santé (ex-Paces). Depuis septembre, elle « travaille de 6 heures à 22 h 30 tous les jours », avec seulement « quinze minutes pour les repas », détaille Pauline, qui, en quelques mois, a perdu plusieurs kilos, et « tient » désormais avec des anxiolytiques et des somnifères prescrits par son médecin.
Ce marathon de la première année, nombreux sont ceux qui, dans l’ancien modèle de la Paces, l’ont vécu. Cette année, c’est un « double marathon » : en plus du tronc commun de santé classique, Pauline doit aussi suivre des cours de droit. Il s’agit de sa mineure, une des nouveautés du système en vigueur depuis la rentrée 2020. La discipline mineure permet une porte de sortie pour poursuivre ses études en deuxième année de licence, en cas d’échec à intégrer les études de santé en fin de première année. De quoi, initialement, réduire l’effet « couperet » et « gâchis » d’une première année qui ne débouchait sur rien en cas d’échec au concours. L’enjeu de la réforme, qui vient supprimer le fameux numerus clausus − le nombre de places limité, déterminé par l’Etat −, était aussi de réduire les impacts négatifs sur la santé mentale générés par l’ancienne Paces.
Mais sa mise en place se révèle plus chaotique qu’espéré, « trop vite appliquée », de l’avis de beaucoup de directeurs d’études, et entravée par l’irruption de la crise sanitaire. Si bien que c’est davantage une explosion du stress et de la fatigue qui se dessine chez les étudiants, qui ont la sensation de découvrir les règles du jeu au fil de l’eau − notamment concernant le nombre de places qui leur sera réservé en deuxième année. Et pour lesquels se sont ajoutées les difficultés, dues à l’épidémie de Covid-19, d’un enseignement à distance, empêchant de constituer des groupes de travail, et d’une restriction des maigres sorties et contacts sociaux.
« Inhumain »
« Les étudiants paient les pots cassés de la transition vers une réforme qui manquait d’anticipation, et qui a eu du mal à se mettre en place sur le plan local », dénonce Morgane Gode-Henric, présidente de l’Association nationale des étudiants en médecine de France (Anemf). Au cœur du problème : une adaptation des programmes qui n’a pas toujours eu lieu pour faire la place à la nouvelle mineure. « Bien souvent, pour les PASS, les facultés ont gardé le programme de Paces et ajouté à cela la centaine d’heures de cours de la mineure, constate Morgane Gode-Henric. Je peux vous assurer, pour l’avoir fait, que la charge de travail de la Paces était largement suffisante sans avoir besoin d’en rajouter. »
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