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Emmanuel Macron supprime l'ENA pour « changer radicalement » la formation des hauts fonctionnaires

Le chef de l'Etat a annoncé, ce jeudi, la suppression de l'Ecole nationale d'administration. Elle sera remplacée par un Institut du service public, dont une partie de la formation sera commune à treize autres écoles. Le classement de sortie est maintenu, mais la titularisation vers les grands corps ne pourra plus se faire à la fin de la formation initiale.

« Nous avons besoin de services d'excellence et (non) plus de protection à vie », avait lancé Emmanuel Macron, en avril 2019, après avoir lui-même emprunté la voie de l'Inspection générale des finances à la sortie de l'ENA.
« Nous avons besoin de services d'excellence et (non) plus de protection à vie », avait lancé Emmanuel Macron, en avril 2019, après avoir lui-même emprunté la voie de l'Inspection générale des finances à la sortie de l'ENA. (PATRICK HERTZOG/AFP)

Par Marie-Christine Corbier

Publié le 8 avr. 2021 à 20:04Mis à jour le 13 avr. 2021 à 15:39

Plus personne n'y croyait. Emmanuel Macron a annoncé à la surprise générale la suppression de l'Ecole nationale d'administration (ENA), ce jeudi après-midi, devant plusieurs centaines de cadres dirigeants de l'Etat. Il est ainsi revenu à sa promesse faite en avril 2019, au sortir du grand débat national , après la crise des « gilets jaunes ». Une promesse que l'on pensait oubliée. L'Elysée la justifie par le fait qu'il ne « faut plus viser une réforme de l'action publique mais une révolution ».

Pour la formation des futurs hauts fonctionnaires, un « Institut du service public » remplacera l'ENA afin de « changer radicalement la manière dont on recrute, dont on forme, dont on sélectionne, dont on construit les parcours de nos hauts fonctionnaires », a déclaré le chef de l'Etat. Il sera installé à Strasbourg où se trouve actuellement l'ENA. Cet Institut recrutera les futurs administrateurs de l'Etat, et assurera à la fois leur formation initiale et continue, cette dernière devant prendre la forme d'une « école de guerre de la haute fonction publique civile », comme l'avait préconisé le rapport Thiriez en février 2020.

Tronc commun pour treize écoles

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Le nouvel Institut formera les élèves administrateurs de l'Etat en formation initiale et organisera aussi un tronc commun d'enseignements avec treize écoles de service public (Ecole nationale de la magistrature, Institut national des études territoriales, écoles d'application de Polytechnique, etc.) Ce tronc commun portera sur les transitions écologique et numérique ou encore sur les principes républicains « pour que l'ensemble des élèves fonctionnaires maîtrisent ce socle ». L'Elysée ne prévoit pas d'autres suppressions d'écoles que l'ENA « à ce stade », mais « la question pourra se poser à l'avenir ».

Les concours organisés par l'ENA continueront de l'être par cet Institut du service public. Le nouvel Institut devra « construire un partenariat fort avec les universités », a souligné Emmanuel Macron, il proposera « des diplômes reconnus à l'échelle européenne et internationale ».

En matière d'affectations, Emmanuel Macron veut mettre fin à la sortie directe des élèves fonctionnaires vers les grands corps que sont le Conseil d'Etat, la Cour des comptes ou les corps d'inspection ministériels. A l'issue de leur scolarité, les élèves fonctionnaires seront donc « affectés dans un corps unique » baptisé corps des administrateurs de l'Etat. Il succède au corps des administrateurs civils, avec un périmètre élargi. « Nous avons besoin de services d'excellence et (non) plus de protection à vie », avait lancé Emmanuel Macron, en avril 2019, après avoir lui-même emprunté la voie royale de l'Inspection générale des finances à la sortie de l'ENA.

Le Conseil d'Etat, « cinq ou six ans » après l'école

La question de la titularisation dans des corps tels que le Conseil d'Etat ou la Cour des comptes ne se posera qu'« après plusieurs années d'exercice sur le terrain, sur des missions opérationnelles, sans doute cinq à six ans après la sortie de l'Institut de service public ». Pour le chef de l'Etat, « on ne pourra plus intégrer le Conseil d'Etat, la Cour des comptes ou les inspections à 25 ans, mais après s'être distingué par des résultats concrets, c'est-à-dire après plusieurs années d'expérience comme administrateur d'Etat ». En ces temps de vives critiques sur la déconnexion des élites, « le terrain devient la première compétence qui est attendue des administrateurs de l'Etat », justifie l'Elysée. D'où la fin de « la rente à vie et (du) parcours automatique du système précédent ».

Cette possibilité d'entrer au Conseil d'Etat ou à la Cour des comptes et de pouvoir retrouver ce corps d'origine à tout moment était au contraire défendue par certains hauts fonctionnaires comme « une école d'indépendance qui n'a pas de prix », offrant la possibilité de « dire non aux ministres s'ils se trompent ». Mais pour l'entourage du chef de l'Etat, cette « promesse d'une carrière ascensionnelle à vie ne fait plus vendre et n'est plus adaptée aux besoins et aspirations des jeunes qui est de pouvoir changer de métier ».

Cette possibilité de changer d'orientation relèvera d'une nouvelle délégation interministérielle à l'encadrement supérieur de l'Etat, dont Emmanuel Macron a annoncé la création.

Dès le 1er janvier 2022

La création du corps des administrateurs de l'Etat et celle de l'Institut du service public seront effectives dès le 1er janvier 2022, indique-t-on à l'Elysée, où l'on évoque « un changement inédit depuis 1945, un changement en profondeur des parcours et de la formation des hauts fonctionnaires ». A ceci près que le classement de sortie de l'ex-ENA sera maintenu, tout comme les grands corps. C'est l'ENA qui est maintenue sous une nouvelle forme, et non le grand soir annoncé, font déjà savoir certaines voix critiques.

La décision, très politique, du chef de l'Etat a aussi été très critiquée par l'association des anciens élèves de l'ENA, son président Daniel Keller n'y voyant que « de la poudre aux yeux » qui « ne va rien changer », avant même qu'Emmanuel Macron n'en donne le détail.

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Marie-Christine Corbier

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