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Les dark kitchens essaiment hors de la capitale, les chefs se mobilisent

Les « cuisines fantômes » qui proposent des marques de restauration destinées à la livraison se développent dans les métropoles régionales. Les indépendants veulent repartir au combat pour protéger le terme « restaurant ». Un député de l'Aisne vient de saisir Bruno Le Maire.

Après Paris, les « cuisines fantômes » ont commencé à se déployer dans les métropoles régionales.
Après Paris, les « cuisines fantômes » ont commencé à se déployer dans les métropoles régionales. (Dévor)

Par Valerie Landrieu

Publié le 22 avr. 2021 à 10:30Mis à jour le 23 avr. 2021 à 11:05

Le phénomène des « dark kitchens » a bondi avec les couvre-feux et les confinements. Thierry Marx, chef innovant à l'affût des tendances, estime que le développement de ces « cuisines fantômes » qui proposent des marques de restauration destinées à la livraison, a gagné dix ans en France, avec le Covid.

Après Paris, elles ont commencé à se déployer dans les métropoles régionales tandis que restaurateurs et fournisseurs locaux voient arriver avec une certaine inquiétude une foodtech en ébullition. Taste, présent à Paris, Versailles, Lille et Rouen, vise Strasbourg, Nantes ou Bordeaux. Not So Dark, qui vient de faire une levée de fonds de 20 millions d'euros, veut ouvrir 30 cuisines en région. Dévor, ex-Dark Kitchen, annonce son développement en franchise, à Lille, Le Havre, Nantes, Strasbourg, Montpellier et Caen, avec un objectif : disposer d'un réseau d'environ 70 points de vente d'ici aux trois prochaines années.

Inquiétude des restaurateurs

Interpellé sur le sujet dans sa circonscription, le député LR de l'Aisne, Julien Dive, vient d'écrire au ministre de l'Economie, Bruno Le Maire, pour connaître sa position et ses réflexions vis-à-vis de l'émergence et de la croissance de ce nouveau modèle économique. « Je considère que la question doit être à l'esprit des décideurs publics ; c'est peut-être le moment de s'interroger sur la manière d'encadrer l'activité », pèse prudemment l'élu. « Nous prenons le sujet très au sérieux », ne cache pas de son côté Laurent Fréchet, président de la branche des restaurateurs au Groupement national des indépendants (GNI). Il le soumettra d'ailleurs prochainement à Alain Griset, le ministre délégué aux Petites et Moyennes Entreprises.

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Difficile toutefois de savoir quelle est la part de fantasme et de réalité : il y a quelques années, les foodtrucks, annoncés à tort comme la poule aux oeufs d'or de la restauration, avaient suscité un vif débat dans la profession. Partagé entre les acteurs indépendants, les plateformes numériques qui, comme Deliveroo Editions, deviennent opérateurs immobiliers et aménageurs de cuisines, et les entrepreneurs de la start-up nation, le marché des dark kitchens n'est pas encore structuré. Quant à son poids économique, tout juste sait-on qu'une unité moyenne multi-enseignes réalise un peu plus d'un million d'euros de chiffre d'affaires par an. Et que la demande dépasse assez largement l'offre.

Transparence pour le consommateur

A Bordeaux, les performances du marché test ont achevé de convaincre Jean Valfort, fondateur de Dévor, et ses associés qu'il fallait passer à la vitesse supérieure en dehors de Paris. Restaurateurs traditionnels, ils s'étaient lancés en pionniers dans la capitale dès 2018, en créant une structure dédiée. Leur entreprise aujourd'hui transformée en super-franchiseur croule sous la demande : en moins de trois mois d'existence, 250 candidats se sont déclarés pour investir dans une cuisine professionnelle et un portefeuille de marques de hamburgers, tacos et autres poutines. A terme, Jean Valfort veut leur proposer, en « marketer » avisé, une boutique en ligne pourvue d'une cinquantaine d'enseignes-maison disponibles, avec zone de chalandise prédéfinie et process ad hoc. « C'est le principe de la dark kitchen. La cuisine est physique ; les 'marques' sont virtuelles », résume-t-il.

Un autre mode de consommation

Pas toujours aussi clair, regrette Laurent Fréchet, représentant des restaurateurs indépendants. Selon lui promettre une livraison d'un restaurant de bonne facture, et faire livrer un plat sous licence par une usine à cuisines en périphérie, « ce n'est ni la même préparation, ni le même produit ». Il donne pour exemple un restaurateur thaï branché de l'Est parisien qui sous-traite les commandes reçues via les applis.

L'argument est suffisant pour que les restaurateurs réclament davantage de transparence pour le consommateur et motiver l'organisation professionnelle à repartir au combat pour protéger le terme « restaurant ». Pour Jean Terlon, vice-président de l'Umih Restauration, la restauration livrée est « juste un autre mode de consommation qui accompagne le développement des plateformes vidéo et des séries ». Pour autant, « la question est maintenant de savoir quels seront les chiffres d'affaires des opérateurs après la crise et s'ils empiètent effectivement sur la restauration traditionnelle ».

Valérie Landrieu

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