Par une ordonnance, prise le 15 avril, le tribunal administratif de Paris a donné un petit coup de canif dans la politique d’égalité des chances d’Amélie de Montchalin. L’arrêté du 24 mars que la ministre de la transformation et de la fonction publiques a pris est suspendu, car les juges ont, « en l’état de l’instruction, un doute sérieux quant à la légalité » du texte.
La discorde juridique portait sur la liste des classes préparatoires autorisées à présenter des candidats au concours « Talents » de l’Ecole nationale d’administration (ENA). Cette voie d’accès, dont le président de la République a annoncé la création en février, sera spécifiquement destinée aux jeunes issus de familles modestes. Emmanuel Macron ayant entre-temps également annoncé la suppression de l’ENA, c’est l’établissement qui la remplacera, l’Institut du service public, qui organisera ce concours.
En attendant, par l’arrêté du 24 mars, Mme de Montchalin a listé les classes préparatoires qui pourront présenter des candidats à ce concours, excluant délibérément la préparation aux concours administratifs de Sciences Po Paris. Comme le rappelle l’ordonnance du tribunal, la ministre considérait, en effet, que cela saperait « l’objectif de diversité poursuivi par la création des concours externes spéciaux en renforçant la surreprésentation de cet établissement compte tenu de ses taux de réussite ». Elle justifiait également son choix en affirmant ne vouloir retenir que « des cycles de formation dont la vocation principale est de préparer aux concours ».
« Le principe d’égalité entre établissements »
Les étudiants se trouvant actuellement dans la « Prépa Concours » de Sciences Po Paris y ont immédiatement vu une attaque frontale. Car ceux qui ont saisi le tribunal, « pourtant boursiers », notent les juges, se trouvaient dans l’impossibilité de s’inscrire à ce concours avant la clôture des inscriptions, en mai. L’arrêté de Mme de Montchalin porte donc « une atteinte grave et définitive à leur chance d’accès à ces écoles », déplorent ces étudiants.
Par ailleurs, les juges notent que les taux de réussite aux concours administratifs « revendiqués » par Prépa Concours « ne semblent pouvoir refléter autre chose que le niveau d’excellence de ses étudiants dont nombre d’entre eux sont boursiers, à l’image des requérants ». Ils ne sont donc pas « un obstacle à l’objectif poursuivi de diversité sociale, l’établissement en cause étant par ailleurs fortement engagé dans l’aide aux étudiants en difficulté ou en situation de handicap ». Pour le tribunal administratif, c’est bien « une erreur » de droit qu’a commise la ministre : elle n’a pas respecté « le principe d’égalité entre les établissements dispensant des formations de même nature ».
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