La réforme du bac devait donner naissance au « lycée des possibles », selon la formule de Pierre Mathiot, auteur du rapport qui l’a inspirée. Première cohorte de ce grand chantier de l’enseignement secondaire, les candidats au baccalauréat général 2021 ont dû choisir trois spécialités en première, et en abandonner une en terminale.
Les données publiées en mai par la Direction de l’évaluation, de la prospective et de la performance (DEPP) confirment qu’il existe une grande variété de parcours, là où des critiques de la réforme pointaient le risque d’une reproduction à l’identique des anciennes sections (scientifique, économique et sociale et littéraire). Cependant, libérés des rails des anciennes sections, les choix de spécialité des élèves dépendent beaucoup de leur milieu social ou de leur genre.
« Plus les choix sont précoces, plus l’environnement familial et les stéréotypes pèsent sur le choix des élèves », explique Marie Duru-Bellat, sociologue de l’éducation. Les élèves se sont adaptés différemment à cette formule à la carte. Ainsi, les lycéens les plus favorisés socialement se sont plus fréquemment orientés vers des filières plus classiques, qui ressemblent aux anciennes sections du bac général. En « mathématiques et physique chimie », ils représentent par exemple 51,9 % des effectifs.
Même tendance pour le duo « histoire-géographie sciences économiques et sociales », qui se substitue, lui, à l’ancienne section « ES ». Là encore, les plus favorisés sont surreprésentés. En revanche, les élèves en bas de la structure sociale sont, eux, plus souvent inscrits dans les spécialisations littéraires ou dans les mélanges originaux de matières. C’est le cas, par exemple, avec l’ensemble de spécialités « histoire-géographie et sciences de la vie et de la Terre (SVT) » ou encore « sciences économiques et sociales et SVT ».
Anticipation de l’orientation post-bac
Quant aux nouvelles matières ouvertes par la réforme, elles font partie des spécialités les plus fréquemment abandonnées entre la première et la terminale. Dans cette première cohorte, 64 % des élèves ayant choisi « sciences de l’ingénieur » ont abandonné la discipline. En « numérique et sciences informatiques », ils sont la moitié seulement à poursuivre en terminale. Là encore, les filles arrêtent plus souvent cette matière que les garçons.
Les mathématiques, elles, sont très largement prisées par les lycéens, mais concentrent toutes les inégalités. La matière, aujourd’hui exclue du tronc commun, doit être choisie en spécialité ou en option pour être étudiée jusqu’en terminale. Sans surprise, la moitié des filles arrête la spécialité entre la première et la terminale, contre un tiers chez les garçons. Un écart qui se creuse encore si l’on tient compte de l’origine sociale : le taux d’abandon de la matière s’élève à 25,5 % pour les garçons les plus favorisés, mais il est plus de deux fois supérieur pour les filles les plus défavorisées.
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