Ici un « Pass grand oral » à 190 euros pour se « préparer à la prise de parole » devant le jury d’enseignants. Là des coachs « spécialistes du grand oral du bac et de sa notation » proposent leurs services pour « obtenir les meilleures notes (…) à partir de 240 euros ». Et là-bas, un stage de dix heures « pour arriver serein le jour J ! » est facturé 250 euros… Depuis que le ministre de l’éducation, Jean-Michel Blanquer, a confirmé début mai que l’épreuve de grand oral du baccalauréat aurait bien lieu à la fin du mois de juin, comme celle de philosophie, la communication des acteurs privés du coaching et du soutien scolaire pour s’y préparer a repris sur Internet et les réseaux sociaux.
Dès le début de cette année scolaire fortement perturbée par la crise due au Covid-19, entreprises et autoentrepreneurs spécialisés dans le conseil aux élèves se sont mis en ordre de marche pour tirer leur épingle du jeu de cette épreuve phare du nouveau bac. Au grand dam d’une partie de la communauté éducative attachée au service public.
« Il est assez logique que ces acteurs privés se soient positionnés sur le grand oral qui est une opportunité pour eux sur le marché éducatif, d’autant plus sur des compétences (l’oral, la confiance en soi, l’orientation, etc. ) sur lesquelles ils sont déjà très présents », commente Anne-Claudine Oller, maîtresse de conférences en sciences de l’éducation et autrice du Coaching scolaire : Un marché de la réalisation de soi (PUF, 2020).
Sur la Toile, la plupart des offres de ces acteurs proposent en effet de travailler les « techniques de la prise de parole en public », la « confiance en soi », ou « la cohérence » de l’exposé du projet d’orientation devant intervenir dans les cinq dernières minutes de l’entretien.
Comme toute réforme éducative (notamment Parcoursup), celle-ci, menée à marche forcée depuis trois ans dans le contexte mouvant de la crise sanitaire, « charrie son lot d’incertitudes et d’angoisses pour les élèves, auxquelles l’institution ne répond pas toujours… », renchérit Philippe Vivier, lui-même coach et président de l’Association française du coaching scolaire et étudiant, qui milite pour une régulation de la profession.
« Ça ne fonctionne pas »
Alors, le « grand Ô », un boulevard pour le privé ? Pas tout à fait, cependant, ou pas encore. « Les élèves que j’accompagne se comptent sur les doigts d’une main », raconte Paul Vialard, coach en art oratoire et formateur. « Nous n’avons pour l’instant que quelques demandes mais ça va venir, plus l’échéance se rapprochera », veut croire de son côté Sandra Le Grand, du site Yapuka.org.
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