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A Londres, le lycée Winston-Churchill à l’heure des tablettes numériques

Ce lycée international privé a fait des nouvelles technologies un outil d’apprentissage performant.

Par  (Londres, correspondance)

Publié le 02 juin 2021 à 12h00, modifié le 15 juin 2021 à 18h21

Temps de Lecture 4 min.

Des élèves du lycée international de Londres Winston-Churchill en cours avec leurs tablettes, le 24 mai 2021.

Les 24 collégiens de 3e planchent en silence sur leur exercice de physique. Certains travaillent seuls, d’autres en petits groupes, et leur professeure se rend disponible pour les épauler. Scène banale d’un cours en classe, à un détail près : ces adolescents écrivent tous sur leur iPad. A l’exception d’une élève qui utilise également une feuille de papier.

Au lycée international Winston-Churchill de Londres, un établissement français privé, tous les élèves reçoivent un iPad à l’entrée en 6e. « Plutôt que d’acheter un paquet de livres, on distribue des tablettes, ça revient au même prix », explique Mireille Rabaté, la proviseure. Ce sera leur principal outil de travail au collège et au lycée. Les cours et les devoirs sont transmis à chaque enfant via le logiciel Classroom, édité par Google.

« Quand on m’a demandé d’ouvrir cette école, la feuille de route était de créer l’école du XXIe siècle, explique Mireille Rabaté. Mais ce ne sont pas les iPad qui font que l’école est moderne. » Pour elle, il ne s’agit que d’un outil, qui permet d’enseigner différemment. « C’est l’équivalent de l’ardoise d’autrefois, mais avec Internet. C’est maniable, ça peut se montrer de loin, se tourner… »

Au cours de physique, Marie Lahorgue, la professeure, confirme avec enthousiasme. Arrivée il y a trois ans après être passée par un établissement à Agen (Lot-et-Garonne), elle met en avant la flexibilité qu’apportent les tablettes. « Je peux beaucoup plus facilement différencier l’enseignement en fonction du niveau des élèves. Si l’un d’entre eux a fini un exercice avant les autres, je peux en donner un nouveau, par exemple. »

Qu’est-ce qui empêche de faire de même avec du papier ? « Il y a des choses aussi simples que la limite des photocopies. Dans mon précédent établissement, chaque professeur avait le droit à un nombre limité, cela réduit les possibilités. » Difficile de toute façon de savoir à l’avance combien d’élèves iront à quelle vitesse, et la tablette offre cette flexibilité. Il est aussi possible d’inclure des vidéos dans les cours, ou des liens. Un élève peut aussi projeter à l’écran l’exercice qu’il vient d’effectuer, pour montrer sa méthode à tout le monde. Autre avantage : « On ne perd pas de temps à recopier le cours. » Un détail, mais qui permet de mieux se concentrer sur l’apprentissage lui-même.

Pas d’accès libre

Yann Houry, le directeur de l’innovation de l’établissement et professeur de français, enregistre de son côté différentes dictées à l’avance. En fonction de leur niveau, les élèves suivent l’une des versions, avec leurs écouteurs dans les oreilles. « Je donne tout le programme de l’année en septembre, avec différentes pistes en fonction des difficultés. Ensuite, je suis les progrès des élèves. »

Il ne s’agit pas de livrer les collégiens et les lycéens à eux-mêmes avec un libre accès à Internet. Les iPad sont bridés en fonction des âges. YouTube n’est pas accessible en 6e et ne le devient progressivement que dans les classes supérieures. L’App Store, qui permet de télécharger des applications, n’est pas non plus disponible pour les plus jeunes. Netflix est bloqué quel que soit l’âge. De toute façon, les professeurs ont accès aux iPad des élèves et peuvent surveiller dans la classe ce que chacun y fait.

Lors de la première vague de la pandémie, en mars 2020, l’établissement s’est retrouvé immédiatement prêt à basculer en enseignement à distance. Quasiment aucune journée n’a été perdue. « Beaucoup d’élèves, qui préféraient le calme chez eux, ont même pu avancer plus vite », témoigne Julien Astruc, le directeur du secondaire. La différence a été visible avec des élèves arrivés de France en septembre, qui avaient quelques lacunes après avoir connu une période sans enseignement lors du premier confinement.

Pour les élèves, la tablette est une évidence. « J’ai découvert ça, il y a une dizaine d’années, à San Francisco, explique Mireille Rabaté. Les jeunes s’approprient immédiatement la machine. S’ils regardent une image dessus, ils l’agrandissent, la tournent, la manipulent… Alors qu’avec un polycopié, le format est fixe. »

Travail de pédagogie à l’encontre des parents

Le mode d’apprentissage a, en revanche, beaucoup dérouté… les parents. Il a fallu faire preuve de pédagogie pour expliquer cette nouvelle méthode. A l’arrivée de l’élève dans l’établissement, l’iPad ne lui est pas donné, mais à ses parents. « La première année [en 2015], on était vraiment les seuls à faire ça et il a fallu beaucoup expliquer », raconte Mireille Rabaté. Les parents ont été rassurés à la vue des résultats aux examens : 100 % de réussite au bac, dont un tiers de mentions très bien en 2019 (deux tiers en 2020, pendant la pandémie).

Les tablettes ne sont qu’un des éléments derrière cette réussite. Le fait que l’éducation soit entièrement bilingue français-anglais, que les enfants viennent très largement de milieux privilégiés (les frais annuels sont de 15 000 euros, même s’il existe des bourses), que les classes soient inférieures à 25 élèves est au moins aussi important. « Un mauvais professeur reste mauvais avec un iPad », rappelle Mireille Rabaté.

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Au primaire, les tablettes existent mais restent sous le contrôle des professeurs. Un tel outil électronique nécessite d’abord d’avoir une certaine autonomie dans l’apprentissage, que les plus jeunes n’ont pas. Il faut aussi développer la graphie, pour que l’écriture à la main soit maîtrisée.

Mireille Rabaté s’interroge pourtant : l’iPad sera-t-il bientôt dépassé ? Contrairement au succès mondial de l’iPhone, la tablette d’Apple ne s’est pas imposée de façon aussi générale. La proviseure a regardé les Chromebook, qui sont des ordinateurs portables avec clavier qui font aussi tablette. « C’est intéressant, mais pas révolutionnaire. Après tout, l’imprimé a mis cinq cents ans à être dépassé. »

Cet article est réalisé dans le cadre d’un partenariat avec In-FINE, forum international du numérique pour l’éducation.

Deux journées de débats

In Fine, Forum international du numérique pour l’éducation, propose les 3 et 4 juin deux journées de débats, en clôture du cycle initié le 11 mars – 70 débats animés par plus de 270 intervenants. Accessibles en ligne sur la plate-forme www.in-fine.education, la parole y sera donnée à des enseignants, des formateurs, des chercheurs, des collectivités… In Fine, organisé par une dizaine d’acteurs publics nationaux ou territoriaux, a notamment proposé plusieurs temps forts, dont Le Monde est partenaire, autour des thèmes « Eduquer au numérique », « Transformer les pratiques pédagogiques » et « Accompagner les parcours d’apprentissage ».

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