Avec la nécessité de décarboner les villes d’ici 2050 – ce qui signifie des bâtiments plus sobres en énergie et une réduction massive des émissions de CO2 au moment de la construction –, l’intérêt pour la filière bois, qui fait encore figure de niche au pays de Le Corbusier et des frères Perret, ne cesse de grandir chez les géants français du béton. Plusieurs signes récents traduisent une évolution du secteur.
Le dernier en date est l’annonce, jeudi 3 juin, de l’arrivée du groupe Eiffage parmi les souscripteurs du nouveau Fonds bois et éco matériaux lancé par Bpifrance fin 2020. Ce fonds, le troisième du genre, doté désormais de près de 80 millions d’euros avec les 8 millions d’Eiffage, vise à soutenir une filière industrielle dite « à fort potentiel ». Mais qui gagnerait à être plus structurée si la forêt française, quatrième d’Europe, doit contribuer à réduire l’empreinte carbone du secteur du bâtiment et à créer des emplois non délocalisables.
La nouvelle réglementation environnementale pour les constructions neuves (la RE2020), qui fait la part belle aux matériaux biosourcés, et la demande grandissante du marché pour le bois – des collectivités, mais aussi des clients « qui veulent des actifs immobiliers qui ne se déprécient pas facilement », explique Valérie David, la directrice développement durable et innovation transverse d’Eiffage –, contribuent à faire bouger les lignes.
« Si on veut multiplier la construction durable, il faut que l’approvisionnement soit fluide, avec un niveau de standardisation homogène », poursuit Valérie David. Mais il y a aussi le souci de se fournir avec une matière première qui n’aura pas été produite au-delà des frontières de l’Union européenne, « et qui aura donc un impact sociétal et environnemental positif », poursuit-elle.
« L’accélération est nette »
Dans le même ordre d’idées, début mai, c’est Bouygues Bâtiment France-Europe qui signait un contrat d’approvisionnement de deux ans et demi avec l’un des plus gros scieurs et producteur de panneaux français, le vendéen Piveteaubois. Pour le milieu, qui représente tout de même 380 000 emplois, c’est une petite révolution. Jusqu’à présent, les scieurs ne travaillaient guère avec une visibilité de plus d’un ou deux mois.
Là, si les carnets de commande s’allongent, c’est la possibilité pour les industriels d’investir plus facilement dans de nouvelles lignes de sciage qui, pour les plus modernes, coûtent dans les 10 millions d’euros. Et pour Bouygues Bâtiment, qui affiche l’objectif de réaliser un tiers de constructions bois d’ici à 2030, c’est la certitude d’être livré en matériaux, et à des coûts maîtrisés. En cette période de crise où certaines poutres se font attendre plus de quatre mois et où les prix du bois s’envolent, cela prend d’autant plus de sens.
Il vous reste 41.42% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.