On ne parierait pas, en rencontrant Claire, Joshoa ou Anis, qu’ils ont été un jour des élèves « en difficulté », rencontrant des problèmes de concentration, d’organisation ou de discipline. Ce groupe d’internes, qui nous fait visiter le lycée professionnel Pierre-Coton de Néronde (Loire), n’a plus grand-chose à voir avec l’image d’Epinal du lycéen « à problèmes ».
Claire a géré l’arrivée du projet « compost » au lycée et prépare son stage en Irlande, en 2022, « pour progresser en anglais ». Anis, qui rejoindra une école d’architecture après son bac pro, est président de l’association des élèves, celle qui a permis au fil des années d’acheter les poufs de la salle de détente, la machine à café et la console de jeux. Joshoa, « délégué de l’internat », raconte avec des étoiles dans les yeux son voyage à Shoreditch – haut lieu du street art londonien – l’année précédente avec son professeur d’anglais.
Leur établissement, « vieillissant », comme le dit pudiquement la CPE, vient de rejoindre la liste des « internats d’excellence », dans le cadre d’une vague de labellisations annoncée fin mai par Nathalie Elimas, secrétaire d’Etat chargée de l’éducation prioritaire auprès du ministre de l’éducation nationale. Aboutissement du « plan internat » annoncé en juillet 2019 par Jean-Michel Blanquer, le label a été accordé, sur dossier de candidature, à 253 internats scolaires, auxquels s’ajoutent 54 autres qui bénéficient en plus du « plan de relance » – des enveloppes parfois importantes pour construire ou moderniser les locaux. En tout, 35 000 places d’internat bénéficient désormais de ce label, sur les 222 812 que compte le pays.
Marotte personnelle de Jean-Michel Blanquer, les « internats d’excellence » n’ont plus grand-chose à voir avec ceux lancés sous la mandature de Nicolas Sarkozy. Ils étaient symbolisés par l’internat de Sourdun (Seine-et-Marne), ouvert en 2009 dans une ancienne caserne militaire alors que l’actuel ministre de l’éducation était recteur de Créteil. Les « internats d’excellence » de 2021 ne ressemblent pas aux pensionnats d’antan, dont Sourdun voulait reprendre certains symboles. Au point de se demander ce qui justifie d’en labelliser un plutôt qu’un autre ?
« Le projet pédagogique, l’investissement de l’équipe, l’ancrage dans le territoire et l’objectif de mixité sociale ont compté dans la labellisation », énumère-t-on au cabinet de Nathalie Elimas. L’objectif est de faire revenir les élèves vers l’internat, dont les places ne sont occupées qu’à 79,6 %, pour 82,3 % en 2015.
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