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Cités éducatives : un premier bilan encourageant

Les 80 cités éducatives lancées en 2019 ont fait l'objet d'un premier rapport. Où l'on apprend que ce modèle est bien un facilitateur de mobilisation collective en faveur des jeunes dans les territoires "ségrégués". Des axes d'amélioration demeurent, qu'il s'agisse de la participation des élus régionaux ou des actions vers les 16-25 ans.

Lancées à la rentrée scolaire de septembre 2019 sur 80 territoires, les cités éducatives viennent de faire l'objet d'un premier rapport annuel de la part de leur comité national d'orientation et d'évaluation (CNOE). Mis en ligne récemment, ce document présente "un premier bilan d’étape" de ce programme visant à intensifier les prises en charge éducatives des jeunes de 0 à 25 ans en s'appuyant sur l'alliance de tous les acteurs éducatifs travaillant dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville (Éducation nationale, commune et intercommunalité, préfecture, caisse d’allocations familiales, associations, etc.). "Le modèle de fonctionnement des cités éducatives a montré sa pertinence en situation de crise, il a pu montrer qu’il n’est pas un dispositif de plus mais un facilitateur de mobilisation collective, se réjouit le CNOE. Il reste à le conforter, en prolongeant, par temps calme, les habitudes collaboratives, la considération des acteurs, et leur mobilisation."

Des élus inégalement présents

En termes de déploiement, on apprend que la configuration majoritaire est la présence de plusieurs cités éducatives (de deux à six) dans un même département, "ce qui peut faciliter des échanges entre elles", juge le rapport. En revanche, plus du tiers des cités éducatives sont seules dans leur département.

Quant aux élus des collectivités territoriales (conseils départementaux et régionaux), ils sont présents de manière inégale. Ainsi, plus du tiers des cités éducatives associent des élus du conseil départemental au comité de pilotage. Une présence qui est même systématique quand le comité de pilotage associe préfets et Dasen (directeurs académiques des services de l'Éducation nationale). Les élus du conseil régional ne sont pour leur part présents que dans 15% des cités éducatives. Une situation "problématique" au regard de la mise en œuvre de l’obligation de formation des 16-18 ans, selon le CNOE. Enfin, des représentants des métropoles ou des conseils communautaires sont toujours associés. Mais le rapport déplore que l’on ne sache pas toujours s’il s’agit d’élus ou de représentants de service.

En ce qui concerne le pilotage opérationnel, le rapport note que "la présence, nouvelle, de l’Éducation nationale dans une politique éducative territorialisée est un fait majeur". Mais il ajoute que "si les deux autres parties prenantes (villes et préfectures) ont des habitudes anciennes de travail en commun, il faudra un peu de temps pour que le monde de l’Éducation nationale s’imprègne de la culture [de la] politique de la ville".

Retard dans le déploiement des actions

En termes de contenus, les thématiques relatives à la sécurisation des parcours, aux relations avec les familles, au numérique et à la culture "sont les plus prégnantes dans les plans d’actions des cités éducatives". À l'inverse, le renouvellement urbain (seulement 12 cités concernées) ou l’égalité entre filles et garçons (30) font l'objet de moindres développements.

Le rapport pointe par ailleurs le fait que "c’est sans doute dans le champ culturel que les écarts de pratiques des familles sont les plus manifestes, participant grandement au creusement de la fracture éducative". Si les cités éducatives en ont souvent fait un axe d’intervention, le deuxième confinement, à l'automne 2020, a en partie réduit leurs possibilités d’action et une partie des interventions prévues dans le domaine culturel a été reportée.

Plus globalement, 80% des cités éducatives ont indiqué un retard dans le déploiement de leur programme d’actions. Cause principale : le contexte sanitaire, mais le versement tardif des crédits ou le manque de ressources humaines opérationnelles sont également avancés.

L'angle mort des 16-25 ans

Enfin, le rapport met en avant des écarts d'actions selon les publics-cibles des cités éducatives. La plupart des actions concernent en effet les jeunes d’âge scolaire (de 3 à 16 ans). Le CNOE précise que très peu de cités éducatives ont bâti un groupe de travail thématique embarquant des acteurs essentiels pour les 16-25 ans.

Enfin, en termes financiers, le rapport indique que l’enveloppe moyenne attribuée par l'État s'élève à un million d'euros par cité éducative pour trois ans. Alors que l’engagement prévu de l’État se monte à 100 millions d’euros sur la période 2019-2022. Toutefois, en cette première année de fonctionnement, très bouleversée par la crise sanitaire, il n’a pas été possible pour la coordination nationale de recevoir les éléments nécessaires à la production d’un bilan financier. Cela devra faire l’objet d’un travail prioritaire en 2021, précise encore le rapport. Sur ce chapitre, on peut toutefois constater une variété de modalités de gestion des crédits : en direct par les préfectures ou confiés à un GIP, à une collectivité ou à une caisse des écoles, ou encore des crédits répartis entre plusieurs gestionnaires en fonction des publics.

En conclusion, le CNOE souhaite que l’expérimentation en cours permette une "modélisation des méthodes et des actions inspirantes spécifiques à des territoires urbains fortement ségrégués", mais aussi la détermination de critères permettant de définir ce que peut être une "bonne" cité éducative, notamment en termes de pilotage, d’enrôlement des acteurs, d’avancement des projets ou d'actions incontournables.

Nouvel appel à manifestation d'intérêt pour les cités éducatives

Le ministère de l'Éducation nationale, le ministère de la Cohésion des territoires et des Relations avec les collectivités territoriales et le ministère délégué à la Ville viennent de lancer un nouvel appel à manifestation d'intérêt pour les cités éducatives. Cette deuxième extension vise la labellisation de nouvelles cités éducatives afin d’atteindre l'objectif de deux cents territoires engagés dès le premier trimestre 2022.

Sont éligibles les dossiers cumulant les caractéristiques suivantes : territoires en QPV (quartiers prioritaires de la politique de la ville) de plus de 4.000 habitants, comptant au moins un collège classé en réseau d’éducation prioritaire (REP+ ou REP), subissant des dysfonctionnements urbains importants et bénéficiant à ce titre d’un projet dans le cadre du nouveau programme national de renouvellement urbain (NPNRU) d’intérêt national ou d’intérêt régional, et enfin confronté à un enjeu de sécurité marqué (quartier de reconquête républicaine ou zone de sécurité prioritaire).

Quant aux critères de labellisation, ils sont au nombre de neuf et vont du diagnostic partagé à une gouvernance stratégique et partagée, en passant par des moyens financiers garants de l’opérationnalité et de l’ambition du projet, ce qui implique notamment des contributions de chaque membre, sous forme financière, matérielle ou humaine.

La date limite pour le dépôt des dossiers est fixée au 30 septembre 2021. Le comité de labellisation se réunira en novembre 2021.