« Tout ce que vous ressentez a sa place ici. » La phrase est prononcée avec calme par un homme qui porte un pull vert, un jeans, des chaussures hautes marron plus toutes neuves. Mais qui a vraiment fait attention à la façon dont est vêtu Philippe Dayan, devenu, depuis la diffusion, en février, d’En thérapie, la série d’Arte créée par Olivier Nakache et Eric Toledano, le psy le plus célèbre de France ?
Aux heures de grande écoute, la télévision donnait déjà à voir les chemises bleues d’un Christophe André, les vestes grises d’un Boris Cyrulnik, les ensembles noirs d’un Marcel Rufo. Pendant la préparation, la créatrice de costumes Anne-Sophie Gledhill avait épinglé ce genre de silhouettes sur son moodboard, afin de s’en inspirer pour dessiner la garde-robe du docteur Dayan : « Des images en vrac de psys d’aujourd’hui. Des médiatiques, des anonymes, des blogueurs. »
Divisé en 35 épisodes, le succès de la première saison – plus de 40 millions de vues – a demandé à Anne-Sophie Gledhill patience et précision. « On a d’abord commencé à travailler ensemble avec le décorateur. Sachant que la série consiste en un face-à-face entre un psy et un ou plusieurs patients dans un lieu unique, il fallait que l’image soit à la fois belle et un peu sourde, que rien ne grince. On s’est accordés sur une gamme de tons doux, des gris, des marron, des beiges, des bleus, relevés de rouges, plus vivants », raconte-t-elle dans les locaux des Mauvais Garçons, un loueur de costumes parisien chez qui elle a ses habitudes.
Parisien ou provincial ? Jeune ou vieux ? Riche ou pauvre ?
Puis est venue l’heure des interrogations. Que faire porter à ce personnage central pour qu’il soit juste, pas trop terne ? Un costume deux-pièces ? Un col mao ? Un foulard raffiné ? « Il se devait d’être un personnage à la fois accessible et rassurant, moderne mais pas trop typé : j’ai opté pour une sorte de neutralité bienveillante », dit-elle : des pulls en laine à col en V et des vestes kaki, des pantalons en toile de coton ou denim, des chaussures en cuir, une écharpe rouille. Il a fallu faire attention à ce que Dayan, interprété par le subtil Frédéric Pierrot, ne porte pas les mêmes couleurs que celui ou celle qu’il reçoit en séance. « Si chacun avait le même pull bleu, ce serait pénible pour le spectateur, qui les regarde tous les deux pendant trente minutes. »
Le vêtement l’attire, l’intrigue. « Mais pas le milieu de la mode, plutôt la dimension sociologique du vêtement : ce qu’il raconte d’un milieu, d’une origine, d’une volonté de se montrer au monde à un moment donné. » Anne-Sophie Gledhill
Il vous reste 64.52% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.