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Education : les réformes lancées par Jean-Michel Blanquer « restent à concrétiser »

Dans un entretien aux « Echos », Alain Boissinot, ancien numéro deux du ministère de l'Education nationale et figure reconnue du monde de l'enseignement, revient sur les quatre années écoulées. Jean-Michel Blanquer « a lancé des grands chantiers », constate-t-il, mais « on est au milieu du gué. »

La réforme du bac, l'un des dossiers� les plus emblématiques de Jean-Michel Blanquer.
La réforme du bac, l'un des dossiers les plus emblématiques de Jean-Michel Blanquer. (Damien Meyer/AFP)

Par Marie-Christine Corbier

Publié le 27 août 2021 à 07:40

C'est la dernière rentrée du quinquennat pour Jean-Michel Blanquer. Le ministre de l'Education nationale est arrivé en mai 2017 à son poste en connaissant par coeur les dossiers qui l'attendaient. Que retenir des réformes menées… et de celles qui n'ont pas abouti ?

« Jean-Michel Blanquer est devenu ministre à une période charnière, où toute une série de modes de fonctionnement anciens marchaient de moins en moins bien », rappelle Alain Boissinot dans un entretien aux « Echos », en citant d'abord le baccalauréat.

Pour cette figure du monde de l'éducation, ancien directeur général de l'enseignement scolaire et recteur de l'académie de Versailles pendant neuf ans, la réforme du lycée et du bac est le dossier « le plus visible » des cinq ans écoulés. « Le bac était le couronnement des études secondaires. La réforme a conduit à traiter le lycée comme un parcours vers l'enseignement supérieur, et l'accent s'est déplacé du bac vers Parcoursup », se félicite-t-il. Quant aux inégalités - sociales et de genre - observées dans le choix des enseignements de spécialité des élèves, il est encore « trop tôt », dit-il, pour en dresser le bilan.

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Jean-Michel Blanquer « a lancé des grands chantiers », mais « on est au milieu du gué, les mesures restent largement à concrétiser ». Au titre des « difficultés majeures », il cite « le recrutement et la formation initiale des maîtres avec, année après année, des difficultés pour attirer les jeunes », et « un mauvais rendement des concours : il n'y a pas assez de candidats dans des disciplines majeures ».

La réforme de la formation initiale qui se met en place en cette rentrée, avec des étudiants en alternance, « ne résoudra pas tout ». Car « les futurs enseignants sont tiraillés » entre la préparation du concours et celle du master : « On n'a pas réussi à construire un vrai parcours de formation », estime Alain Boissinot.

La fin du concours ?

Il invite donc à « choisir » entre les deux voies et lâche : « Les concours ne sont peut-être plus nécessaires. » C'est en tout cas « l'un des scénarios possibles ». « Un concours sert à sélectionner des candidats, or on a moins de candidats que de places au concours, donc c'est idiot », poursuit-il. Il invite à s'inspirer de l'Allemagne, avec des étudiants qui prépareraient, à l'université, un master « fléché vers » les métiers de l'enseignement, et le ministère mettrait en place une procédure de recrutement.

Un autre scénario est envisageable : celui des anciennes écoles normales. Cela reviendrait à s'inspirer du modèle des écoles d'ingénieurs, « en recrutant par concours les futurs enseignants qui feraient trois années d'études dans de vraies écoles dédiées ».

Pour l'heure, « on est au milieu du gué », regrette-t-il. Et il juge peu probable que le sujet s'invite dans la campagne présidentielle , « car le recrutement par concours, c'est un peu une vache sacrée ». L'ancien recteur de Versailles évoque « le recrutement hors concours de façon clandestine » qui conduit les rectorats à demander aux recalés des concours de venir enseigner comme contractuels.

« Une prolétarisation du monde enseignant »

La prime d'attractivité versée depuis mai dernier aux jeunes enseignants peut-elle enrayer cette crise de recrutement ? « On peut espérer, mais je suis sceptique car les mesures envisagées restent saupoudrées et peu visibles », estime Alain Boissinot qui évoque « une forme de prolétarisation du monde enseignant ».

Le candidat Macron avait promis de placer les meilleurs professeurs devant les élèves présentant les plus grandes difficultés scolaires. La promesse « n'a pas été engagée », pointait l'Institut Montaigne cet été. « Le ministre est sensible à cet objectif, assure Alain Boissinot, mais la crise sanitaire n'a pas aidé. »

Il souligne en revanche « la progression de la gestion des ressources humaines au niveau de l'encadrement supérieur et des chefs d'établissement » : elle est « moins visible » pour le grand public mais elle nourrit « une culture du management dans l'Education nationale ».

« Les ambiguïtés du macronisme »

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Jean-Michel Blanquer voulait aussi davantage d'autonomie pour les établissements et, en contrepartie, les évaluer davantage. La création du Conseil d'évaluation de l'école « va dans ce sens », analyse l'ancien recteur. Mais « derrière des signes d'une plus grande autonomie des établissements, il y a une pratique du pilotage de l'Education nationale très jacobine », qu'il voit comme « une des ambiguïtés du macronisme ». « Il n'y a jamais eu autant de discours prescriptifs, de circulaires, de pressions sur l'encadrement, conclut-il. C'est contradictoire. »

Marie-Christine Corbier

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