Télémédecine : « C'est un outil complémentaire qu'il importe de cadrer »

David Quint a représenté le SNVEL au sein du groupe de travail panprofessionnel sur la télémédecine vétérinaire.

© Jacques Graf

Exercice

Le SNVEL* fait partie du groupe de travail panprofessionnel chargé d'évaluer l'expérimentation télémédecine vétérinaire. Pour son vice-président, notre confrère David Quint, qui y participe, la timidité des confrères à s'approprier ce nouveau mode d'exercice vient notamment du manque de temps à lui consacrer. Il importe cependant, selon lui, de lui donner sa chance car la télémédecine a sa place dans une offre de soins globale.

La Dépêche Vétérinaire : Vous représentez le SNVEL* au sein du groupe de travail panprofessionnel sur la télémédecine vétérinaire. Comment expliquez-vous le manque d'intérêt pour la télémédecine évoqué par de nombreux vétérinaires ?

David Quint, vice-président du SNVEL : Plusieurs facteurs peuvent intervenir mais principalement, l'activité très forte des cliniques et cabinets vétérinaires depuis l'an dernier a pu limiter le temps disponible pour mettre en place et promouvoir le nouveau service.

D'autre part, l'expérimentation imposait un certain nombre de contraintes (inscription, retours d'expérience...) qui ont pu être des freins à la motivation des consoeurs et confrères.

Par ailleurs, le métier de vétérinaire généraliste trouve sa valeur ajoutée dans le lien et le contact personnalisé, et la valeur de l'examen clinique, plus indispensable qu'en médecine humaine où le patient peut assez bien décrire sa maladie.

A ce stade, les vétérinaires ne ressentent peut-être pas le besoin de la télémédecine dans leur pratique. Pour autant, nous ne pouvions pas nous exonérer de bien définir les choses dès maintenant car le contexte change vite et l'opportunité de le faire ne se présentera probablement pas facilement par la suite. 

D.V. : Faut-il convaincre les équipes de l'intérêt de cette pratique, comment et dans quel but ?

D.Q. : Il s'agit essentiellement de permettre de cadrer une pratique qui, à l'heure d'Internet, pourrait se développer sans nous, sans notre avis, notamment depuis l'étranger.

Il s'agit surtout d'un outil complémentaire qui peut aider au suivi des cas, notamment. Bien proposé, dans une offre de soins globale, la télémédecine ne révolutionnera peut-être pas la médecine vétérinaire mais pourrait aider à valoriser des conseils et suivis que les vétérinaires n'arrivent pas à se faire payer actuellement.

Le développement des objets connectés est également à prendre en compte pour les années futures (suivi d'activité, de poids...).

D.V. : Comment trouver et construire un modèle économique pour cette pratique ?

D.Q. : C'est là que le bât blesse... Pour cela, il faudra promouvoir ce nouveau service et, pour ce faire, il faut du temps que les consoeurs et confrères n'ont pas beaucoup.

Du côté des partenaires éleveurs, qui sont habitués à ce que le conseil leur soit donné gracieusement le plus souvent par téléphone, ils ont l'impression qu'on va leur faire payer ce qu'ils avaient gratuitement.

Comme je l'ai dit plus tôt, c'est dans une offre de soins globale que la télémédecine prendra sa place.

Il est important de dire que seul le vétérinaire traitant pourra réaliser des actes de télémédecine pour un animal (jusqu'à un an maximum après sa dernière consultation) et que c'est comme ça que nous l'avons voulu. Une plus forte restriction a été débattue à notre demande mais le groupe a considéré que restreindre plus aurait des effets négatifs sur le développement du service. 

Les plate-formes de téléconsultations qui ne connaissent pas les animaux ne seront pas autorisées. En revanche, dès qu'un vétérinaire aura vu un animal une fois, il pourra réaliser des actes de télémédecine pendant un an. 

Il est important de s'appuyer dès maintenant sur des définitions légales de la téléméde cine pour en prévenir les dérives (exemple : consultation versus conseil, déjà développé par des sites en ligne et payant).

D.V. : Quelles sont les prochaines étapes pour sa mise en place ?

D.Q. : Le rapport du groupe de travail panprofessionnel va être rendu et il aborde tous les points.

Je regrette que nous n'ayons que peu de retours car certains aspects n'ont pas pu être documentés. Ainsi, certaines craintes des confrères apparaissent comme « le pire qui n'est pas certain » et il est dommage que l'expérimentation n'ait pas permis de balayer plus de cas.

D.V. : Quel message souhaitez-vous adresser aux praticiens vétérinaires à ce sujet ?

D.Q. : La télémédecine est une pratique qui se développera (plus ou moins vite). L'ensemble des membres du groupe en est convaincu, les autorités également et nous avons tout fait pour que le vétérinaire traitant en reste l'acteur incontournable.

Pour les animaux de production, en particulier, c'est la réforme du suivi sanitaire permanent promise par la Direction générale de l'alimentation (mais malheureusement au point mort, faute de combattants) qui permettra de lever les doutes. La télémédecine, elle, n'est pas la cause des problématiques.

* SNVEL : Syndicat national des vétérinaires d'exercice libéral.

Article paru dans La Dépêche Vétérinaire n° 1584

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