Il n’y avait pas trente-six moyens de répondre au refus croissant des médecins psychiatres de figurer sur les listes d’experts judiciaires que magistrats et avocats sollicitent énormément. Eric Dupond-Moretti, le ministre de la justice, a annoncé, lundi 13 septembre, lors d’un déplacement au tribunal judiciaire et à la cour d’appel de Montpellier, un important coup de pouce à la rémunération de ces expertises.
L’objectif du garde des sceaux est, selon son entourage, de « reconstituer le vivier d’experts dont la justice a besoin ». De fait, il se réduit comme peau de chagrin. A Montpellier, les psychiatres constituent une proportion importante des experts ayant demandé leur retrait de la liste pour cause de « surmenage », selon la présidente du tribunal judiciaire, Catherine Lelong.
Au niveau national, le nombre d’experts psychiatriques inscrits sur les listes des cours d’appel est passé de 800 en 2007 à 537 en 2011 puis 338 en 2017, selon le ministère de la justice. Alors que, dans le même temps, le législateur a augmenté le type d’infractions dans lesquelles les expertises et les contre-expertises sont obligatoires ou de droit. Quelque 49 000 expertises psychiatriques et 40 000 expertises psychologiques ont été ordonnées par la justice en 2019 (pour juger la compatibilité d’un maintien en garde à vue avec un état psychique, évaluer l’abolition du discernement dans une affaire criminelle, estimer le besoin d’un suivi sociojudiciaire, éclairer une décision sur un éventuel aménagement de peine, etc.). Cette situation de crise préoccupante a fait l’objet d’un important rapport d’information bouclé au printemps par les sénateurs Jean Sol (Les Républicains) et Jean-Yves Roux (Parti radical de gauche).
Les psychologues aussi augmentés
Dans le détail, M. Dupond-Moretti a annoncé, lundi, une hausse de 18 % (de 429 à 507 euros) du tarif forfaitaire appliqué pour les expertises judiciaires classiques réalisées par des praticiens du secteur privé. Les expertises psychiatriques en matière d’infractions sexuelles, qui nécessitent souvent un travail plus long, seront désormais facturées 526,50 euros contre 448,50 euros, soit une augmentation de 17 %. En outre, les critères définissant une expertise « hors norme », rémunérée 750 euros, sont assouplis alors que seules 50 expertises sont entrées dans cette catégorie en 2018.
La question de la rémunération était une des principales revendications des organisations professionnelles de psychiatres, qui mettaient sur ce plan le premier motif de désaffection de la profession pour l’expertise judiciaire. Les praticiens hospitaliers, ou « collaborateurs occasionnels du service public », avaient, pour leur part, déjà obtenu en 2017 une hausse de 17 % de leurs tarifs, dont le coût avait été partagé entre les ministères de la justice et de la santé. Le garde des sceaux a également annoncé une hausse de 5 % (de 370 à 390 euros) des expertises menées par des psychologues.
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