L’étable, le foin, l’odeur des animaux, les bottes qui s’enfoncent dans la boue : voilà un univers dans lequel Ilyès Neffati se sent bien. « Mon truc, c’est vraiment l’élevage », commente ce garçon costaud de 17 ans, tâtant au passage un museau qui pointe entre les grilles. Ce matin, son groupe d’étudiants vétérinaires visite la rutilante exploitation de Jean-Charles Caillaud, à Lauzelle (Haute-Vienne), aux portes du parc régional de Millevaches : 90 bovins « certifiés herd-book » – l’aristocratie de la vache limousine. Ilyès Neffati vient d’intégrer l’école vétérinaire de Lyon, juste après son bac, bénéficiant de cette toute nouvelle voie d’accès aux quatre écoles de France (Lyon, Maisons-Alfort, Nantes et Toulouse).
Pour les écoles vétérinaires, ce mode de recrutement inédit est loin d’être cosmétique. Les artisans de la réforme lui confèrent même un enjeu capital pour faire évoluer le profil des futurs vétérinaires. C’est-à-dire recruter des jeunes dont les aspirations sont davantage en adéquation avec les besoins de la profession – qui accepteront, par exemple, de travailler dans les zones rurales. Il s’agit aussi de remédier à un phénomène en hausse ces dernières années : les abandons en début de carrière. « Aujourd’hui, un tiers des vétérinaires arrêtent la pratique avant 40 ans », s’inquiète Jacques Guérin, le président de l’ordre. Un vrai problème, alors qu’il existe en France un manque structurel de vétérinaires, à la campagne mais aussi en ville, pour accompagner la forte croissance du marché des animaux de compagnie.
La réforme revêt également un enjeu financier. Avec cette nouvelle voie, l’objectif est de réduire la durée et donc le coût des études, pour les familles comme pour le contribuable ; et d’aligner la France sur les pratiques européennes. D’autant plus que, désormais, plus de la moitié des nouveaux inscrits à l’ordre des vétérinaires ont été formés à l’étranger.
Il faut dire que ces écoles coûtent cher : si l’on intègre les activités de recherche des enseignants, la formation d’un élève coûte 40 000 euros par an, soit plus de deux fois le coût d’un futur ingénieur… Une facture essentiellement payée par l’Etat (les frais de scolarité annuels s’élèvent à 2 500 euros). « Ceux que nous recrutons en postbac feront six ans d’études supérieures au total, au lieu de sept ou huit. Cela nous semble suffisant », commente Marc Gogny, ancien directeur de l’école d’Alfort, missionné par le ministère de l’agriculture pour piloter la réforme.
Davantage de jeunes de petites villes
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