"L'équation interculturelle paraît plus simple aujourd'hui, alors qu'elle est en réalité plus compliquée" - Interview ISIT

Modifié le 20 mai 2022 | Publié le 10 février 2020 (archive)
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Lors d'une matinée consacrée à mieux connaître l'ISIT, l'Intercultural School qui se situe entre l'école de management et l'école de langues, nous avons pu rencontrer Tamym Abdessemed, son directeur général depuis un peu plus d'un an.
Propos recueillis par Julie Mleczko

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L'ISIT a été créée en 1957. En cette année de signature du traité de Rome, l'objectif est de former des professionnels passeurs de sens et de culture. Depuis l'établissement est entré à la Conférence des Grandes Écoles, son diplôme visé à Bac+4 et il a obtenu la qualification d'établissement d'enseignement supérieur privé d'intérêt général (EESPIG).

Multilinguisme et interculturalité sont les deux mots clés de votre l'établissement. Quel est leur sens, par rapport à ce que vous apportez à vos étudiants ?

photo t abdessemed3 1 "L'idée est très simple. Le multilinguisme est un socle fondateur, sur lequel on ne négocie pas. On est effectivement capable de partir de ce socle pour l'activer en situation professionnelle et cela s'apprend par une méthode.
L'interculturalité c'est donc justement le processus par lequel nos étudiants vont savoir travailler avec les autres, converger avec les autres et donc mobiliser à la fois des éléments de diversité et des éléments de convergence. Il faut donc bien trouver un terreau commun à partir des différences. On travaille riche de nos différences, on n'uniformise pas. On les entraîne dans les textes, car les textes c'est de la pensée, c'est donc derrière les comportements mais aussi dans les actes puisqu'à travers les expériences qu'ils réalisent en entreprise, on leur apprend à apprivoiser cette dynamique et à l'exercer en situation professionnelle. Nos étudiants sont capables de déployer ce mécanisme pour être à l'aise immédiatement et aller au fond de ce qu'on attend d'eux en matière d'agissement professionnel."

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Vos diplômés se placent dans quels types de fonctions et d'entreprises ?

"C'est très important d'en parler en effet. Là vous allez retrouver une large variété de métiers. D'abord nos étudiants se placent dans des organisations internationales, des entreprises ou encore des associations. En fait, à chaque fois que l'interculturel et l'expertise sont sollicités, il y a une place pour nos diplômés ! Cela peut être donc être dans tous les environnement professionnels, ce qui est très riche et ce qui attire aussi nos étudiants. ils se disent finalement, riche de cela, je vais pouvoir agir un peu partout. On va aussi les retrouver dans des métiers historiques, qui sont encore très importants même s'ils se renouvellent, comme des métiers de traduction spécialisée de très haut niveau, des métiers d'interprétation de conférences, qui sont très intenses, mais aussi des métiers de communication interculturelle et digitale notamment. Prenons un autre exemple : s'agissant de sites web que l'on doit construire de manière interculturelle pour des cibles en Asie, on ne le construit pas de la même manière qu'un autre site. Ce n'est pas que de la traduction justement, on designe autrement par rapport à des schémas de pensée différents. Cela peut être aussi des métiers de marketing, de développement international par exemple pour aller créer des filiales ou y concourir, des métiers enfin de management interculturel et des métiers du jurilinguisme où l'on conjugue l'expertise et la finesse interculturelle avec l'expertise juridique. Ils sont d'ailleurs très demandés. Ce sont des métiers très divers mais le socle commun est le même et ce qui me semble important, c'est qu'au fond ce sont des études de management et de communication interculturelle. C'est inséparable. formations 625x417 Si vous me dîtes "vous êtes une école de commerce" je vous dirais non.Si vous me dites "vous êtes une école de management", je vous dirais non aussi. Nous ne sommes pas seulement cela, c'est un tout. Ce sont un peu des hautes études intellectuelles, où l'interculturel devient le prisme d'entrée mais où vous retrouvez des métiers extrêmement différents, mais tout ceci parce qu'il y a des métiers où l'expertise interculturelle prime sur le reste. Je pense par exemple à des personnes qui sont parties faire du développement dans le secteur de la défense ou du matériel électronique de très haut niveau, et qui ont pu le faire justement parce qu'elles avaient la finesse linguistique et intellectuelle pour entrer en interaction et ainsi remporter de grands contrats. Ce qui aurait été impossible, si elles n'avaient pas suivi ce cursus.
Derrière tout ceci, il y a des méthodes communes. Cette dialectique chez un interprète, de comprendre quelque chose qui est différent pour le translater vis à vis de quelqu'un d'autre qui est encore différent et bien c'est un exercice de l'esprit mais qu'on retrouve en réalité dans l'action. C'est pour cela que j'essaye de faire cet aller et retour entre l'agir intellectuelle et les disciplines comme la traduction qui peuvent aller très loin comme la traductologie par exemple (NDLR : la science de la traduction)."

L'interculturalité, on en parle beaucoup. Mais devient-elle plus simple ou plus compliquée au fil des années selon votre point de vue ?

"Cela paraît plus simple, parce qu'on pense que l'on a un monde sans frontière. On se dit que nos étudiants ont les mêmes usages et que les entreprises se comportent de la même façon, mais en réalité, on observe exactement le contraire ! Derrière des phénomènes de globalisation des contenants, les contenus restent extrêmement teintés nationnellement, culturellement et par continent. Il y a des choses qui nous rassemblent, mais il y a encore des choses qui nous différencient et il faut même les entretenir. À l'ISIT, on est par exemple défenseur de la langue française, on n'est pas un campus ou tout est écrit en anglais parce que justement, on veut faire que toutes les langues, dans leur diversité, soient respectées. recherche 625x417 2 L'équation interculturelle paraît plus simple aujourd'hui, alors qu'elle est justement plus compliquée. C'est d'ailleurs ce que nous disent les entreprises. Cela reste un vrai défi.
En revanche, ce qui est aussi manifeste, c'est que le nombre d'endroits ou ce défi se pose est plus important, car les échanges ont augmenté, les gens coopèrent. Les réseaux sociaux ont amené des contacts entre des individus qui ne sont pas les mêmes. C'est aussi intéressant car cela veut dire que l'enjeu n'est pas que pour l'économie, il l'est pour les sociétés et les individus. Nous mêmes, nous sommes dans un pays qui a besoin de travailler son rapport à l'interculturel, avec des gens de nationalités différentes, d'origines différentes. On a du bilinguisme un peu partout, qu'on ne cultive pas toujours de la bonne manière, alors que c'est un levier pour aller au contact de civilisations différentes. Pourtant on aurait plutôt tendance à se dire "raisonnons assimilation" car on est obsédé par un certain nombre de questions. Au fond, on a un tas de leviers pour être partout, à un carrefour de passeur de sens qui va être capable de travailler partout dans le monde. C'est aussi cela la vocation de l'école." Pour quel(s) métier(s) êtes-vous fait ? Faites le test pour le savoir !
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